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Festivals: des jardins au jazz, il n’y a qu’un pas

Melody Gardot, tête d’affiche de Jazzin’Cheverny

Depuis de nombreuses années, le jazz a fait de Cheverny l’une de ses terres de prédilection grâce à son festival convivial et inventif. Du 28 juin au 1er juillet, dans le cadre bucolique du parc du Château et sur la place de l’église, de grands noms du jazz défileront sur scène. À retrouver notamment Melody Gardot, Jean-Christophe Cholet ou encore Stanley Clarke.

Pour cette onzième édition, le grand moment des musiques jazz en Loir-et-Cher s’est fendu d’une programmation éclectique et transnationale. C’est là que convergeront des talents hexagonaux comme le pianiste Jean-Christophe Cholet, l’une des figures les plus singulières des musiques improvisées. Ou encore le saxophoniste, clarinettiste, flûtiste et compositeur Sylvain Rifflet. Mais surtout des talentueux représentants du jazz américain comme le bassiste et contrebassiste Stanley Clarke et surtout l’icône internationale du jazz vocal Melody Gardot. Artiste accomplie, cette brillante compositrice et interprète à la voix de velours est la véritable tête d’affiche de cette édition. La musicienne américaine vient de sortir « Live in Europe » un disque dont la pochette dévoile madame de dos, nue avec une guitare. Les âmes sensibles de s’esclaffer ! Pourtant, pas franchement de quoi se pâmer. À la manière, on ne compte plus les exemples : Janet Jackson, Nicki Minaj, Mylène Farmer, Prince, ou encore récemment le groupe Rhye, avec la compagne de son leader… toute nue.

Sirène enjôleuse

Outre cette nudité affichée, l’album de Melody Gardot regroupe des chansons enregistrées sur les scènes européennes, entre 2012 et 2016. Parmi les captations de plus de trois cents concerts, elle a choisi « les morceaux qui donnent le plus de sentiments, de nostalgie, de souvenirs ». Des tubes « Baby I’m a fool, My One and Only Thrill, Who Will confort me », ou le classique « Over the Rainbow », mais pas seulement. À Lisbonne, elle a chanté « Lisboa » avec la foule, à Londres elle a fait briller « Les étoiles » avec le public et à Utrecht « March for Mingus » a mis l’auditoire en exaltation. À chaque fois, elle réussit le prodige de donner à chacun l’impression qu’elle susurre pour lui, à son oreille, ses mélodies jazzy de sirène enjôleuse, alors qu’elle se produit dans de grandes salles et festivals. On se délectera de ces moments magiques sur cet album sans grande originalité par ailleurs. En concert, Melody joue du piano et de la guitare, propose des séquences intimes et d’autres bien plus orchestrées avec ses musiciens. Son leitmotiv : « quand on sort d’un concert, on doit avoir envie de faire l’amour ! On doit avoir envie de célébrer l’amitié, de célébrer la vie ! Et les musiciens doivent transpirer pour ça ! » En cette fin juin à Cheverny, Melody Gardot rouvrira cette parenthèse enchantée qu’elle nous propose depuis plus de dix ans. En nous hypnotisant sur scène derrière ses lunettes noires elle nous offre un voyage sur des refrains jazzy en nous enveloppant de sa voix de velours.

ARP

Programmation
du château
29, 30 juin et 1er juillet
vendredi 29 juin
20 h 30 : Jean Christophe Cholet
22 h 30 : Stanley Clarke

 


 

D’une pensée végétale à l’autre, on ne badine pas avec les jardins de Chaumont

27e. Déjà. Les années passent mais ne se ressemblent pas à Chaumont, à l’instar des éditions qui se succèdent. Cette fois, il est question de penser au jardin. Mais sans pression, rassurez-vous. En flânant et rêvant grâce à une vingtaine de créations détonantes.

S’il y a une chose qu’il faut retenir de ce nouveau festival des jardins, c’est sans aucun doute le fait qu’on en prend plein les mirettes. Comme à chaque fois, me direz-vous, oui mais sauf que là, la couleur prédomine. Beaucoup de bleu roi et outremer, du rose vif également, du rouge encore. Le bruit d’un coeur qui bat ici, un érable qui s’épanouit dans l’eau par-là, des lettres qui manquent à l’appel plus bas, on croise même aux antipodes Harry Potter et Jorge Luis Borges, avant de s’arrêter écouter le chant des grenouilles que l’on devine sous les sculptures de cristaux translucides (et bleus ici aussi) posées sur l’eau, travaillées dans un matériau particulier, le polyvitro, par l’artiste américain Dale Chihuly. Si ces oeuvres, aussi diverses les unes que les autres, invitent à réfléchir, notamment sur la biodiversité et l’environnement, sujets évoqués à maintes reprises avec les concepteurs de ces jardins éphémères de Chaumont, on s’émerveille aussi, on laisse son esprit vagabonder, on prend le temps de respirer surtout. Parmi nos préférés, citons le jardin des voyelles signé par le collectif parisien l’Oulipo, comprenez Ouvroir de littérature potentielle, né sous l’impulsion ente autres des écrivains Raymond Queneau et Georges Pérec, qui permet aux visiteurs de lire au jardin par le biais d’un parterre verdoyant et fleuri où les voyelles ont été remplacées par des plantes et pots garnis. Saurez-vous décrypter le message morcelé en onze vers ? Onze car Chaumont est proche d’… Onzain, tout simplement. Il fallait y penser, c’est le cas de le dire ! Autre coup de coeur, « être là… un peu + ». Derrière ce titre se cache un géant de l’art paysager, à savoir Bernard Lassus. Un grand monsieur à la fois artiste et paysagiste, peintre et urbaniste, chercheur et universitaire, avec lequel il nous a été fort agréable de converser. Dans ses murs végétaux colorés, sa patte s’imprime via des  objets disposés qui n’ont pas été installés là au hasard : une haie artificielle, des boules émaillées, des patins de jardin. «J’ai installé ces patins pour ne pas abîmer l’herbe comme pouvaient le faire nos grands-mères pour le parquet ciré. Tout va se transformer, tout se transforme, «  explique-t-il.  « Le jardin est une activité politique. Avec l’invitation de Chantal Colleu-Dumond, directrice du domaine, je démontre à Chaumont qu’il faut penser le problème. Ce festival ne se résume pas à des décors, il s’agit plutôt de recherches par la transformation. Réfléchir, oui, mais surtout ressentir.» Alors, êtes-vous prêts? Le tapis vert ainsi déroulé n’attend plus que vous.

Émilie Rencien

Festival des jardins jusqu’au
4 novembre. 02 54 20 99 22
et www.domaine-chaumont.fr

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