Vivement la Coupe du Monde de foot


Cet hiver, à l’hôtel de Beauvau, Gérald va mettre un col roulé. C’est Emmanuel, à l’Élysée, qui l’a demandé. Bruno, à Bercy, a déjà montré l’exemple. Olivier, à l’hôtel du Châtelet, est plus discret. Cependant, s’ils trouvent un peu de temps, ensemble ou pas, ils vont regarder la Coupe du Monde de foot à la télé. Chauffage, pas chauffage, on va pas quand même pas boycotter comme de vulgaires prolos-gauchos. Et pi c’est pas comme si, à Doha, Kalid Salman, ambassadeur pour le Mondial, avait expliqué aux Occidentaux que « …L’homosexualité, c’est interdit, parce que c’est un dommage mental ». Nous n’avons pas de problèmes psychiques, ont-ils répondu la bouche en en cœur.
Comme le premier petit singe, ils ne verront pas les cadavres de travailleurs immigrés utilisés comme engrais pour les pelouses des stades qataris. Comme le deuxième petit singe, ils n’entendront pas les plaintes de ceux qui n’ont pas osé mourir sur place. L’Émirat en a décidé ainsi. Comme le troisième petit singe, ils ne diront rien sur les conditions de travail, cela ne ferait pas baisser la température. On ne va pas boycotter pour si peu on vous dit. Et même, bonne idée que ce système de « Kafala », un temps employé par les émiratis. Mettre sous séquestre les passeports des immigrés contre un contrat-visa de travail, c’est peut-être un bon truc. Selon la BWI (Fédération internationale des travailleurs du bâtiment et du bois), qui n’a pourtant rien à voir avec la CGT, cette méthode aurait permis aux employeurs d’exploiter facilement les travailleurs migrants. Même pas surprenant dans un pays où on vient juste d’attribuer un jour de repos et de limiter à 60 heures le nombre d’heures de travail par semaine. Manquerait plus qu’on fasse travailler les enfants aussi. Des trucs comme ça, comme dans les Vieux mariés version patronale, ça peut donner des idées aux plus sages. Nos Riri, Fifi, Loulou et Oncle Picsou se sont dit que l’émirati est un bon exemple. Éclairer le pays des lumières n’a pas de prix, le sang, quand ce n’est pas le sien, non plus.
Alors Gérald a fait équipe avec Olivier pour lancer une nouvelle version de la case de l’Oncle Tom. Une belle intervention, entre deux annonces de blessés à sainte-Soline. À ce sujet, il faudra bien un jour qu’il explique comment seulement 300 militants radicaux, cagoulés certes, masque à gaz sur le nez certes, cote de travail et bottes au pied pour ne pas marcher dans la boue, comme dans le Loir-et-Cher certes, suivis par 3700 éco-terroristes néo-retraités, arrivent à mettre au tas une soixantaine de membres des forces de l’ordre, casqués, entraînés et équipés façon Robocop. Donc, d’un commun accord plutôt que d’un accord commun, ils ont annoncé la couleur. Ils vont régulariser temporairement des demandeurs d’asiles, sans papiers, qui travailleraient dans des métiers en tension. Et de préciser que le visa serait valable le temps que le métier ne soit plus en difficulté. Ce seraient donc des postes en CDI mais qui ne dureraient qu’un temps, comme des CDD. Des CDI mais à temps déterminé quoi. Ici, on ne confisquerait pas le passeport. En France, on n’est pas des sauvages. D’abord, les personnes concernées n’ont pas de papiers, alors… Pour le reste, ce serait pareil qu’au Qatar, cagnard en moins. Olivier a même ajouté que ces titres de séjour concernent « des postes qui sont déjà occupés par des travailleurs en situation irrégulière justement parce qu’ils restent vacants. » En gros, des boulots faits au black, souvent occupés par des blacks aussi. Ce n’est pas pour autant que ce n’est pas de l’esclavage moderne, hein. Mais c’est légal cette fois. Cotisations sociales en sus. Si avec des idées aussi bonnes, on ne pallie pas au manque de médecins, d’infirmiers, de professeurs, de conducteurs de trains, de bus et de camions aussi, ce serait dommage.
Pour les amis de la Marine, pour Éric le Niçois aussi, c’est une régularisation massive en vue. Ce n’est pas de cette manière qu’on pourra appliquer les conseils de Grégoire de Fournas. Déjà qu’on va recevoir les 234 passagers de l’Ocean Viking.

Fabrice Simoes