Avant-après … Le déconfinement made in Centre-Val de Loire s’esquisse


Sur les bords de Loire, les élus communiquent de manière hyperactive pour montrer qu’ils ne restent pas coi face à la pandémie de Covid. Et pendant cette crise qui fait encore rage, chacun se pare déjà, évidemment, pour appréhender la suite sereinement mais assurément. À Orléans, le Conseil régional planche sur la date couperet du 11 mai après les annonces récentes du Premier ministre Édouard Philippe, tandis qu’à Blois, le monde médical s’organise doctement. Doucement mais sûrement.

Sous quelles latitudes et selon quelles modalités surviendra le jour d’après ? La question taraude élus, médecins et plus largement, tout citoyen, après le commencement du confinement depuis le 17 mars et avant les prémisses du déconfinement dès le 11 mai. Dans ce contexte particulier, plusieurs points de préoccupations d’organisation s’entassent sur la table de prévisions. Les établissements d’enseignement figurent notamment au premier plan. En région, en visio-conférence à Orléans, le président du Conseil régional, François Bonneau, et Cathy Munsch-Masset, vice-présidente chargée de l’éducation, affirment que s’agissant des lycées dans le giron de la Région, même s’ils ne seront pas les premiers à s’élancer, « tout est prêt. » En attendant, « l’enseignement à distance s’est développé, les enseignants ont fait preuve de créativité et la bande passante a été multipliée par 10 en 48 heures, dès le début du confinement. Une reprise peut-être en juin ? Quoiqu’il arrive, il existe un risque de décrochage; en anticipation de la rentrée, nous ne cessons d’accompagner les jeunes afin d’éviter que les inégalités augmentent du fait de la fracture numérique. Ainsi, nous allons proposer à l’Éducation Nationale d’ouvrir des salles équipées en informatique et en technologies pour celles et ceux qui n’ont pas accès aux moyens nécessaires à distance. Une expérimentation va être menée pour les lycées qui le souhaitent, avec le respect bien sûr des règles de distanciations physiques en vigueur. Rappelons aussi que la période juin-juillet est celle où traditionnellement, les étudiants choisissent une orientation. Or, les portes ouvertes et autres évènements liés n’ont pu avoir lieu, alors nous ne voulons pas que ces choix soient réalisés par défaut.» Deuxième interrogation d’importance, comment les transports vont-ils se remettre en mouvement ? Toujours selon la voix officielle du Conseil régional, en suivant les instructions gouvernementales, le vice-président sur ledit sujet, Philippe Fournié, explique pour les usagers du rail, pour motif d’aller au travail ou autre raison, que « le retour à un plan de transports satisfaisant est escompté début juin. En patientant, dès le 11 mai, 30 lignes de train seront renforcées aux heures de pointe, c’est-à-dire entre 6h-19h/19h30 et 16h30-18h. La distinction entre première et deuxième classes sera exceptionnellement et momentanément levée afin de respecter l’occupation d’une place sur deux dans les wagons. Il faudra alors que chacun anticipe l’achat de billets du fait de ces contraintes qui restreindront le nombre de sièges accessibles. Les contrôles seront renforcés à l’embarquement. Nous nous adapterons et nuancerons en fonction des cartes des départements placés en zones verte ou rouge, nous attendons des consignes gouvernementales claires. » Pour les voyages scolaires (réseau Rémi),  la remise en route est annoncée progressive. « Là aussi, ce sera un siège occupé sur 2, » précise l’élu précité. « La désinfection sera quotidienne. Nous travaillons à une adaptation de l’offre en fonction des besoins des territoires; les enfants seront sécurisés et les parents informés comme à l’accoutumée en temps réel, en proximité, grâce au maintien du badge numérisé. »

Un nouveau modèle à envisager et surtout, une économie à relocaliser

Jamais deux sans trois. Ultime source de cristallisation des angoisses, l’économie et l’emploi. Quelle parade pour affronter un éventuel écroulement ? François Bonneau, fidèle à son naturel positif et optimiste, rappelle la création du fonds Renaissance (pesant 10 M€) en soutien aux entreprises, notamment les petites, entre autres dispositifs inédits. « Beaucoup d’outils et d’euros sont mobilisés pour aider les entreprises à redémarrer et épauler les trésoreries. Notre engagement est de plus fort sur le secteur du tourisme qui doit reprendre le plus rapidement possible. Nous avons alerté le président de la République et le Premier ministre par courrier sur la situation de nos châteaux, nous pensons aussi au zoo de Beauval et tous les lieux liés à ce type d’activité. Nous n’accueillons pas ici des visiteurs excessivement massés dans des salles fermées, nous avons des sites implantés sur des grands espaces extérieurs. Nous pensons en outre aux hôtels et restaurants. Il faut se préparer car les beaux jours, de mai à août, où tout se joue pour les professionnels du tourisme, passent vite. Nous plaidons donc pour que le Gouvernement ait rapidement une appréciation particulière et locale pour une réouverture dès que possible. » Le vice-président régional en charge du développement économique, Harold Huwart, insiste quant à lui sur la notion de relocalisation. « Le Val de Loire qui possède une force industrielle a une chance à saisir en étant aux avants-postes d’atouts permettant un changement. Plus de 20% de son PIB (14% en national) provient de produits issus de l’industrie. Cosmétique, pharmacie, automobile… Il convient par conséquent d’entrer dans un nouveau paradigme. Nous avons délocalisé par souci de coût et on voit bien que le coût induit est finalement bien supérieur. Dans le monde d’après, la relocalisation en matière de productions et de sources d’approvisionnement apparaît comme un enjeu majeur et encore une fois, la région Centre-Val de Loire a tout à y gagner en termes d’économie, de social et d’emploi. N’oublions pas non plus que cela représente un enjeu de transition écologique. »

 

Une armée de soignants prêts à se renouveler

Et, médicalement parlant, la date butoir du 11 mai, si tout va bien, avant le palier du 2 juin, est-elle crainte ? L’armée soignante répond depuis des mois et semaines à l’appel du front et tient bon la barre en espérant empêcher un nouveau pic dans la tempête; le vent s’apaise mais souffle encore. Là encore, le bâton du changement à opérer est brandi. Lors d’une conférence de presse au centre hospitalier Simone-Veil de Blois mercredi 29 avril, le constat est sans appel. « On ne pourra pas repartir comme avant, ce serait dommage sinon, » estime sans sourciller son directeur Olivier Servaire-Lorenzet, entouré du préfet de Loir-et-Cher, Yves Rousset, et du maire de Blois, Marc Gricourt. « Les messages d’en haut, c’est bien mais il faut aussi écouter les avis des acteurs sur le terrain. Alors que certains pensaient que notre organisation médicale était rigide, nous avons prouvé le contraire en étant capables de nous réorganiser en très peu de temps. Nous sommes fédérés pour prévoir, anticiper et conserver une longueur d’avance sur ce virus qui continue de se propager. Ensuite, quand tout sera aplani, je le répète, une concertation s’imposera. » Bonne nouvelle dans le tableau assombri, face aux malades non-Covid, le nombre de patients Covid-19 diminue, doucement mais sûrement, dans le département du Loir-et-Cher qui n’a pas été débordé. Pour prendre un peu de recul, il a été affirmé qu’en France, actuellement, les patients meurent davantage de cancer que de coronavirus. Ceci étant remarqué, cela n’empêche aucunement la prudence, de mise : le monde médical, à Blois comme ailleurs, qui aura su surfer sur la vague meurtrière, demeure en alerte sur le pont en cas de ressac mortifère. Luc Dalmasso, à la tête de la Commission médicale d’établissement, a martelé à son tour, en choeur avec des professionnels de la polyclinique de Blois, des hôpitaux de Romorantin et Saint-Aignan-sur-Cher, ainsi que des figures soignantes de structures associées. « Juste avant la crise, l’hôpital était … en crise. Ce printemps aura permis plus de coopérations par exemple entre centres hospitaliers et médecine de ville, de faire sortir des projets des cartons, etc. Mais … C’est également la première fois que nous avons fait face à un manque de matériels. Défaire fut simple, mais défaire ce qui a été défait… Notre souhait ? Que personne n’oublie une fois l’éclaircie venue. Nous étions dans un non sens; nous devons repenser notre système de santé, c’est une évidence ! Notre métier, c’est sauver des vies et non les gérer, budgétairement. » Entre l’avant et l’après-virus, finalement, il est possible de noter une similitude avérée : il y a du coeur à l’ouvrage et de surcroît, du pain sur la planche …

Émilie Rencien