Engrillagement en Sologne : Des élus remettent le sujet sur le tapis


Sur la table électorale, le débat revient à l’occasion des législatives de ce mois de juin 2022. Pendant qu’à Ligny-le-Ribault, dans le Loiret, l’enquête publique relative à l’aliénation d’un chemin rural en cul-de-sac, dit du Briou, suit son cours, la thématique de l’engrillagement intéresse à nouveau également, le corps politique notamment. Scrutin oblige…

Fin mai, l’association des Amis des chemins de Sologne, présidée par Raymond Louis et dont le siège est basé à Brinon-sur-Sauldre, dans le Cher (18), a pu rencontrer la maire de Ligny-Le-Ribault (45), Anne Gaborit, pour visiter le village et s’entretenir avec cette élue au sujet de l’aliénation des chemins ruraux. “Un entretien fort aimable au demeurant, avec Madame Gaborit qui a pris de son temps pour nous emmener sur site afin de constater l’état dudit chemin,” a commenté en guise de débriefing, M. Louis, accompagné de son épouse, Marie, webmaster, tout en déplorant. « Ce n’est pas le premier chemin communal (sera-t-il le dernier ?) à être rayé d’une carte communale, dans le seul but de satisfaire une demande de ‘‘convenance’’ La dilapidation des chemins ruraux n’est pas récente mais maintenant elle se fait en mettant la population et les usagers de ces chemins devant le fait accompli. La région Centre-Val de Loire souffre : l’engrillagement, les grilles canadiennes, les empiètements sur les chemins, les demandes d’aliénations répétitives… Quelle tristesse pour notre territoire, son patrimoine, ses chemins et ses itinéraires de randonnées. Si nous voulons que nos petits villages, au demeurant si accueillants, survivent, il faut sauvegarder tous les chemins, même ceux dits ‘‘sans issue’’ ». Pendant qu’à Ligny-le-Ribault, donc, l’enquête publique relative à l’aliénation d’un chemin rural en cul-de-sac, dit du Briou, sur cette commune, a été interrompue le 25 avril puis prolongée jusqu’au 16 juin 2022 “du fait de la nécessité d’une consultation plus importante avec la population », selon la commissaire Martine Ragey, c’est une autre entité associative, l’ACASCE (Association des Chasseurs et des Amis de la Sologne Contre son Engrillagement), qui a discuté avec un autre élu qui s’était peu prononcé jusqu’alors, depuis le Loir-et-Cher cette fois. Le contexte d’élections législatives aidant, l’intérêt est hissé …

Derrière les grillages : Bioulac versus Peltier…

Ainsi, le président de l’ACASCE, Jean-François Bernardin, débriefe : “Le 2 juin 2022, avec Xavier de Bodinat, vice-président de l’ACASCE et Dominique Norguet, président du Comité Central Agricole de la Sologne, nous avons longuement rencontré Pascal Bioulac, maire de Lamotte-Beuvron, et surtout Président du Pays Grande Sologne qui réunit les trois communautés de communes Cœur de Sologne, Sologne des Étangs et Sologne des Rivières. Sur le problème crucial de l’engrillagement, sa position a été très claire : tous les documents d’urbanisme des Pays, des Comcoms, des villes et des villages devront reprendre les préconisations du SRADDET (schéma régional d’aménagement) concernant les clôtures. Limitation à 1,20 m de hauteur et réservation d’un espace au sol de 30 cm. Cette prise de position nous semble marquer une étape décisive pour assurer l’unanimité des responsables élus des Comcoms et cette unanimité devrait donner à nos futurs élus à l’Assemblée Nationale une légitimité essentielle pour entraîner leurs collègues à mettre fin à ce fléau de l’engrillagement de notre région.” En parallèle, face à M. Bioulac, son principal concurrent, le député sortant Guillaume Peltier, ex-LR, parti mener la “Reconquête” d’Éric Zemmour, n’a pas manqué de son côté d’évoquer le fameux et colossal dossier lors d’un apéro-débat de campagne qu’il avait organisé le 7 juin dans le centre-ville de Romorantin à la brasserie “La Belle Époque”. M. Peltier, avait déposé en janvier 2021 à l’Assemblée Nationale une proposition de loi numéro 3761 « visant à lutter contre l’extension de l’engrillagement de parcelles privées dans nos provinces et à renforcer le droit de propriété.” « Ma loi n’a pas encore été votée mais avec celle-ci, il s’agit de trouver un équilibre entre l’engrillagement et le droit de propriété, » a-t-il déclaré en mode resucée devant un public (senior) acquis. « Aujourd’hui, si quelqu’un entre dans votre propriété et se blesse, c’est vous qui êtes responsable. On marche sur la tête ! Je veux à la fois renforcer le droit de propriété et freiner la prolifération des futurs grillages pour préserver la faune sauvage.” Dans la foulée, sans plus détailler, il n’a pas manqué d’annoncer le retour pour septembre ou octobre de la fête de la violette en Sologne, un événement pourtant à la base sarkozyste et non zemmouriste…

Derrière les clôtures : … sans oublier NUPES

Enfin, si la candidate Emmanuelle Chaplault (Renaissance/ LREM) ne s’est guère prononcée sur ces clôtures invasives, Jérémie Demaline (PCF, NUPES, nouvelle union de la gauche), lui aussi engagé dans la course aux législatives de juin, ne tourne pas autour du pot. “ Non à l’engrillagement de la Sologne, non à la privatisation de nos forêts ! La question revient de manière récurrente dans le débat depuis 20 ans. Cette pratique est préjudiciable sur bien des aspects. Couplée avec le démantèlement de l’Office national de la forêt (ONF) par la majorité sortante, elle s’inscrit dans la privatisation d’un écosystème singulier : la Sologne forestière. Je soutiens toutes les initiatives qui visent à interdire le prélèvement de gros gibier dans des propriétés encloses. Il faut faire disparaître toutes les clôtures artificielles et pas seulement empêcher qu’il en soit posé de nouvelles. La Sologne est notre patrimoine commun. Chacune et chacun doit pouvoir s’y promener en paix, ce qui nécessite aussi de mettre fin à la fermeture abusive des chemins forestiers. Cette privatisation de facto des cheminements contribue à empêcher la pratique d’une chasse aussi populaire que raisonnée hors des périodes de fréquentation de ces espaces par les familles ou les randonneurs… Si je respecte la propriété privée, elle peut se matérialiser de manière douce, conforme avec l’environnement, avec l’usage de matériaux naturels, le respect des hauteurs raisonnables (1m20) avec des espaces au pied pour laisser passer les animaux.”

Pour rappel, l’engrillagement n’a rien à voir avec la modeste clôture qui ceint peut-être votre jardin et/ou maison. Certains lecteurs s’en étaient inquiétés il y a quelques mois. Non, l’engrillagement touche particulièrement la Sologne et désigne plutôt une pratique commune à de grandes propriétés et fortunes qui s’adonnent par ailleurs au sein de ces murs infranchissables à un type de chasse de tuerie massive… en enclos.

Émilie Rencien