« Il a suffit d’une seule voix », par Fabrice Simoës


C’est décidé, les députés ont voté. Par 184 voix contre et 183 voix pour, les étudiants pourront continuer à crever la dalle ou, au moins, se gaver de nouilles à pas cher. Le texte de loi qui aurait donné le droit à tous les étudiants de manger au Crous pour 1 € n’est pas passé. La député de la 4e circonscription du Rhone, Anne Brugnera (Renaissance) a d’ailleurs précisé que cette loi était « démagogique ». Ben oui, parce que, pour certains, manger pour pas cher, c’est démagogique.

Tous les fainéants islamo-gauchistes, tout juste bons à bloquer les Fac – sauf celle d’Assas parce que, à Assas, ce sont des vrais étudiants bosseurs et tout, et tout- peuvent donc crever la dalle pour cause de démagogie politicienne. « Caramba encore raté» aurait lancé le général Tapioca à la vue de ce résultat. À une voix près, après avoir fait le ratissage de tous les députés Renaissance, et LR potentiellement capables de voter contre, la loi ne pourra pas être promulguée. Comme l’a dit Sylvain Maillard, député de la première circonscription de Paris, et vice-président du groupe Renaissance à l’Assemblée Nationale, avant d’aller voter : « Grâce à vous, les enfants de votre ami Bernard Arnault pourront aller au Crous et ne payer qu’un euro ». S’il n’avait pas fait HEC, on pouvait qualifier cette réflexion de stupide, tant les enfants de ce pauvre Bernard, temporairement l’homme le plus riche du monde en décembre dernier, s’en battent les steacks. Des mots teintés de gastronomie et de vulgarités associées. Du côté de la famille Arnault, on serait plus enclin à proférer un sentencieux « Peu me chaut… ». Chez les dames qui travaillent tous les jours, sur le bord des ex-routes nationales, dans les allées de forêt, par beau temps comme par temps froid, on n’aurait probablement pas traité autrement que d’orchidoclaste l’élu de la République. Quant à Gérard, l’ancien du zinc du Balto, celui qui a chopé un Master de la connerie sur les réseaux sociaux, il aurait applaudi des deux mains. Comme son cousin!
En plus, les enfants de Bernard -Delphine, Antoine, Alexandre, Frédéric et Jean, à plus de 40 ans pour les deux premiers, et entre 31 et 25 ans pour les trois autres – sont désormais tous trop âgés pour fréquenter les bancs d’une quelconque université. Les petits enfants peut-être. Quoique, si on prend l’exemple de Delphine, diplômée de l’école de commerce Edhec et de la London School of Economics, on peut se demander si une fac française est bien le meilleur endroit pour faire ses humanités ! Déjà, pour les stages de 3e, les ados de la fratrie à Nanard vont généralement chez LVMH… Chez ces gens-là, c’est pas parce qu’on vient de Roubaix que l’on doit s’approprier les mots de chansons de Jacques Brel, on est favorable aux contrats d’alternances. Ici, c’est une année chez Louis Vuitton, une année chez Dior, une année chez Tiffany, une année chez TAG Heuer. Et si avec un Cv comme ça, si avec tous ces efforts d’intégration dans le marché du travail, vous n’êtes pas embauché par papa, c’est à désespérer. Adieu, veau, vache, cochon et héritage …

Attention, on ne dit pas que les rejetons de Bernard ne sont pas bons dans leur domaine respectif. D’ailleurs, a priori, il semble que les seuls glands que l’on trouve au sein de la dynastie soient ceux accrochés sur des mocassins de tous les jours. On remarque aussi que, bien souvent, les fils de maçons font de bons maçons, tout comme les fils d’écrivains deviennent écrivains, à la manière des Dumas. Alors, qu’un fils de patron devienne patron, on ne voit là rien d’anormal. Not’Manu aurait pu expliquer plus simplement que, à la manière d’une vieille parodie du « festival Roblès », avec un papa milliardaire, on a beaucoup moins besoin de traverser la rue pour trouver du boulot.

Au nom de l’égalité des chances, les enfants de Bernard ne pourront donc pas goûter aux charmes des repas du Crous pour 1€. Là, ils ratent forcément quelque chose… Finalement, on peut se demander si le texte était vraiment démagogique ou si seulement la réponse négative était la plus conne que l’on pouvait avoir ?