L’IA ne doit pas tout faire


L’Intelligence Artificielle n’a de limite que celles que l’on veut bien lui fixer. Pouvoir greffer un cerveau bionioque à tous les berlots des réseaux sociaux, ce café du commerce qui a perdu son zinc et son humanité, serait donc possible. La méthode semble simpliste mais d’une efficacité redoutable. Ce serait aussi la possibilité d’instaurer un eugénisme encore plus formaté qu’il ne l’est déjà.
Aldous Huxley et son Meilleur des mondes, le cycle du A d’A.E Van Vogt ne sont plus si loin. Blade Runner de Ridley Scott, celui de Denis Villeneuve aussi, en deviennent presque crédibles. Concrètement on veut bien que la Première ministre du Danemark fasse un discours grâce à l’intelligence artificielle, comme l’a fait aussi un sénateur italien, Marco Orlando. On ne comprends pas très bien le Danois et pas beaucoup plus l’Italien, alors ça passe. Que, pour le 8 mai, le maire de Chartres Jean-Pierre Gorges, utilise les services de cet outil en raison d’un bras cassé, on peut encore trouver matière à excuse. On envisage même avec gratitude le remodelage des discours de Donald Trump. L’espoir d’une bonification de ces textes ne saurait être contredit. Dans l’affaire, on ne peut que gagner en qualité, et surtout en crédibilité. Quand l’IA se targue d’art pictural, c’est une façon conceptuelle de rencontrer un art nouveau. La jeune fille à la perle, initialement de Joannes Vermer, revue et corrigée informatiquement, peut avoir ses défenseurs, ses contradicteurs aussi. C’est une technique totalement déconnectée de l’humain au service d’un autre tableau, pour un sujet identique. Utiliser l’IA dans le domaine médical pour trouver des remèdes ciblés afin de soigner certaines formes de cancer, ça c’est une avancée positive permise par l’IA.
Musicalement, l’IA est capable de nous offrir les plus belles musiques d’ascenseurs à jamais fabriquées. Mieux, elle peut reprendre à son compte la ribambelle de productions pondues à longueur de journée par tous nos nouveaux Beethoven biberonnés à Aya Nakamura et Gims. Cependant l’IA ne peut, ne doit, pas tout faire ; toucher aux chansons des Beatles en fait partie. Et pourquoi pas refaire en 2.0 des morceaux de Led Zep, des Stones, de Charlie Parker, de John Coltrane et quelques autres, le temps qu’on y est !
ChatGPT – le logiciel de raisonnement artificiel actuellement très en vogue et accessible au grand public- est utilisé dans l’Hexagone depuis longtemps. On appelle ça les grandes écoles. Pas de succession de 1 et de 0, pas de disque dur, de clavier… En ces lieux sont données les bases. Une réflexion identique pour un schéma pré-conçu est proposée en libre service. Tout est fourni, éléments de langage compris, de l’abscon à très con. Seul problème, l’humain est capable de dire tout et son contraire. L’auditeur est faillible aussi. C’est même pour ça que ça fonctionne!
Espérons que nos spécialistes de l’IA ont bien relu le cycle de Fondation d’Isaac Asimov. Pourvu qu’ils aient parfaitement assimilé les règles de base: un robot ne peut porter atteinte à un être humain ni, restant passif, laisser cet être humain exposé au danger ; un robot doit obéir aux ordres donnés par les êtres humains, sauf si de tels ordres entrent en contradiction avec la première loi ; un robot doit protéger son existence dans la mesure où cette protection n’entre pas en contradiction avec la première ou la deuxième loi. Revisionner une fois de plus L’homme bicentenaire, avec Robin Williams, peut aider aussi. De la philo de bas étage rétorquera-t-on mais ça peut faire réfléchir… Sinon, on est mal! On est vraiment mal!

Fabrice Simoes