Romorantin a élu le nouveau président du Département

Inéluctablement, l’océan de Loir-et-Cher se compose de requins qui dévorent le menu fretin, pour n’en garder que quelques-uns astreints. Au milieu de ces mouvements de courants chafouins, c’est Philippe Gouet qui est parvenu à surnager, aidé par deux anguilles solognotes. Soit une concorde large comme un fleuve reliant deux rives opposées.
En politique, il y a les hommes et femmes de convictions, et puis il y a les hommes et femmes de dispositions. « Nous avons gagné face au Modem associé au PS, aux Verts et même LFI ! Nous avons gagné face à la trahison, » nous a hélé le 1er juillet à Blois, Guillaume Peltier (LR), député et désormais conseiller départemental du canton de Chambord. Sur la façade de l’Hôtel du Département à Blois ce jour-là, une affiche rappelait une exposition en cours aux Archives départementales, intitulée « Jours de fête ». Assurément, ce jeudi-ci en fut un pour le précité sans hésiter. Cela se sera gâté par la suite pour mister Peltier : un recours a été déposé, contre sa liste glorieuse à Chambord avec Virginie Verneret, auprès du tribunal administratif d’Orléans, par un militant PCF, Jérémie Demaline (union des gauches, Loir-et-Cher en commun). Sans omettre que le patron des Républicains, Christian Jacob, a décidé de le destituer de sa position de numéro 2 dudit parti, suite à ses déclarations franchissant une ligne puisqu’il a estimé “ pouvoir travailler” sans sourciller avec le maire RN de Béziers, Robert Ménard. À l’instar du Loto, en politique, on perd ou on gagne. Mais à chaque fois, on apprend. Et en parlant de leçon et trahison, le Loir-et-Cher paraît réciter un couplet infernal. Et surtout fructueux pour une frange d’élus malicieux : avec 16 voix favorables, Philippe Gouet a été élu président du Conseil départemental de Loir-et-Cher, poste qu’il occupera jusqu’en mars 2028. Une poignée au sein de cette assemblée départementale, celle sûrement qui ralliera le groupe d’opposition “ouvert” promis par le centriste Stéphane Baudu, parie déjà sur un CDD Gouet au profit d’un long cours Peltier par commutation. Obsession fantasmagorique d’envieux ? Ou réalité stratégiquement cachée ? Le jeu de poker fomenteur sera révélé, lorsque le cas échéant, les pièces de ce puzzle supposé daigneront s’emboîter.

Et aussi, possiblement, un ex-président consultant ?
Fichtre, laissons le temps au président de prendre ses marques et armes dans ce panier de crabes. Seize voix donc, dès le premier tour pour Philippe Gouet tombées dans l’escarcelle de la droite et du groupe majoritaire UPLC (Union pour le Loir-et-Cher). Deux de plus qui auront fait la différence face au candidat Modem Stéphane Baudu (14 voix). “L’UPLC est fort, uni,” a exprimé le président élu, professionnel de santé depuis 1981, qui fera d’ailleurs de la santé une priorité dans son mandat. Le tour de magie a en effet opéré grâce à un binôme solognot, les Romorantinais Tania André (ex-PS, qui a déjà par le passé été conseillère générale avec le maire Jeanny Lorgeoux) et le médecin Bruno Harnois, qui avaient le pouvoir de cueillir dans leur pré, à gauche. Ils auront finalement choisi de récolter pour la droite ! Inutile de crier à la Lune avec la meute qui s’époumone déjà, maugréant contre ce duo d’apprentis sorciers solognots, à observer les invectives sur le bûcher le 1er juillet échangées dans la cour du cloître départemental avec l’opposition et en particulier l’équipe de Benjamin Vételé (ex-PS, Génération.s). Par ricochet de gratitude, Tania André obtient par conséquent une cinquième vice-présidence au Département détenu par la droite. Une VP à la culture ? Après avoir été en charge de l’agriculture au Conseil régional dans le groupe à gauche, des socialistes, radicaux et démocrates ? Aïe, ça pique dans un champ immense de roses à la moisson s’avèrant épineuse. L’intéressée rue dans les brancards: « Je n’ai plus d’étiquette politique. Je suis libre et indépendante. Je n’ai pas de leçons à recevoir ! Nous ne pouvions pas soutenir M. Baudu après la campagne calomnieuse à Romorantin de notre adversaire. » Comprenez Louis de Redon. Pendant ce temps, il se susurre que l’ex-président du Département, Nicolas Perruchot, deviendrait consultant auprès de l’agence d’attractivité « Be LC » qu’il a créé l’été 2020. Le 1er juillet 2021, il affirmait, il est vrai : « vous continuerez à me voir souvent ». CQFD ? Et après, selon le second dessein murmuré, il serait nommé ministre du budget aux côtés du président de la République Xavier Bertrand et d’un autre ministre, le maire de Cannes, David Lisnard (LR). Fort heureusement, rien n’est jamais écrit car face à des élus qui ne cessent de s’émouvoir de l’abstention, il serait préjudiciable que les citoyens finissent par songer que tout est acté d’emblée depuis les coulisses politisée, via des bulletins dans l’urne, ceux des arrangements entre amis autrefois ennemis lorsque l’intérêt est motivé… En tout cas, en localité, cela promet encore moult épopées, sous un froid de canard, à lire Pascal Bioulac, maire de Lamotte-Beuvron, réélu conseiller départemental, éjecté de l’UPLC, qui jette un pavé dans la mare : “Le Grand Moscou (saisissez Maurice Leroy) n’a semble-t-il pas de limite géographique. Mes amis, mes adjoints, (et sûrement bien d’autres) reçoivent depuis la capitale russe des messages personnels leur notifiant l’ouverture de la chasse au traître. Ancré au sol, vous pouvez compter sur moi. Le vent d’Est, même fort et froid, ne me détournera pas de la défense des intérêts de la Sologne et de notre Loir-et-Cher.” Ah ce 41, quel joli coin de France aux mélodrames sans fin, mais avec faims !
Émilie Rencien