Romorantin : Nassira El Moaddem, le retour


Après une première conférence mouvementée à la médiathèque fin 2019, la journaliste parisienne, native du Loir-et-Cher, est revenue vendredi 31 janvier 2020 échanger à nouveau autour de son livre « Les filles de Romorantin », paru chez L’Iconoclaste, dans les murs de l’ex-Majo. Plus calmement cette fois.

Lorsque l’on écrit, il faut s’attendre à s’exposer autant au flot de compliments qu’au feu des critiques. Le livre « Les filles de Romorantin » signée par Nassira El Moaddem aura attisé les réactions, paraissant en période pré-électorale, avant le scrutin municipal de mars 2020. L’ouvrage dépeint le regard d’une originaire de qui revient, en pleine époque de contestation sur fond de Gilets jaunes, une fois adulte sur les traces de son enfance et adolescence, constatant que rien n’a vraiment changé, voire pire que tout s’est aggravé ; c’est en tout cas son point de vue. «En revenant, j’ai par exemple été sidérée de l’état d’une école, et je me suis dit : mais que s’est-il passé ? Bah en fait, il ne s’est rien passé, » a expliqué Nassira El Moaddem, dont le père notamment a travaillé dans les murs de l’usine Matra fermée en 2003. « Et pourquoi le musée de la ville de Romorantin, qui s’appelle Matra, ne parle aucunement de tous ces hommes et femmes qui ont participé à cette histoire industrielle ? Mon ADN, c’est raconter. C’est une histoire partagée et j’en avais besoin. J’aime Romorantin, j’aime les gens de Romorantin. Je suis ouverte à la critique. Tant qu’il y a respect.» Ce dernier mot aura d’ailleurs, tel un écho de sourds, été à son tour harangué lors d’une conférence de presse du maire cité dans le livre, suite à un échange à nouveau un peu vif lors d’une réunion publique aux Favignolles une poignée de jours auparavant pendant laquelle la journaliste avait voulu enregistrer. Évidemment, et cela aura alimenté les colonnes de la presse depuis l’automne dernier, cet édile, ex-PS de Romorantin, Jeanny Lorgeoux, ainsi que son équipe municipale, n’auront pas apprécié la prose critique de la jeune femme qui est en sus identifiée La France Insoumise. De surcroît, avant une élection d’importance donc à venir. De quoi crisper certains élus dans une campagne déjà tendue, ou a contrario, donner le sourire à d’autres, opposants. Mais finalement, cela finit par créer un buzz et attirer l’attention sur un livre que certains préfèreraient voir brûler… Pourtant, cet ouvrage, que nous avons lu (nous y avons même précédemment consacré un billet d’humeur), n’est pas un brûlot, mais c’est notre point de vue qui n’engage que nous. On ne peut juste pas plaire tout le monde, d’autant plus quand la politique s’en mêle ! Or, le livre de Nassira El Moaddem décrit finalement le quotidien des villes moyennes ; le focus concerne Romorantin dans le cas présent mais le calque pourrait s’appliquer à d’autres municipalités, considérés négativement parfois comme des « trous » ou « bleds », de la France périphérique rencontrant les mêmes problématiques de paupérisation, de désertification médicale, ou encore de vacance commerciale en centre-ville. « Ce n’est pas politique, c’est simplement humain. Ce livre, c’est ta sincérité, » aura positivement commenté un Gilet jaune, Daniel, aussi cité dans le bouquin. « Nous avons eu des accords, des désaccords également, mais tout est fidèlement retracé. Alors, lisez bien le livre ! » Pendant que d’aucuns tournent les pages, la guerre semble déclarée entre Jeanny Lorgeoux et Nassira El Moaddem à lire un article (à charge) publié le 9 février dans Mediapart, que cette dernière aura intitulé “à Romorantin, le maire, on l’appelle Louis XIV”…

Émilie Rencien