Serge Descout, les pieds sur terre


Un peu plus d’un an après son élection au fauteuil de président du conseil départemental de l’Indre, Serge Descout fait le bilan d’un mandat marqué par la succession au charismatique Louis Pinton, et son inattendu décès en novembre dernier. Fiscalité, investissements, santé, tourisme et campagne présidentielle : Serge Descout se livre au Petit Berrichon, avec pragmatisme et une bonne dose de bon sens paysan.

Le Petit Berrichon : L’actualité c’est vendredi 7 avril, où vous annoncez ne pas augmenter les taux d’imposition. Par quel miracle arrive-t-on à cela dans le contexte budgétaire très contraint ?

Serge Descout : C’est la 14e année de suite qu’on n’augmente pas les taux de fiscalité, nous ne sommes plus que 3 départements dans ce cas (avec l’Isère et le Morbihan). La taxe aménagement du territoire est stable à 0,9 %, et les droits de mutations restent à 3,8 %. Les temps sont durs, nous ne voulons pas peser davantage sur le porte-monnaie des ménages. La dette par habitant, dans l’Indre, est de 55 €/habitant, quand la moyenne nationale est de 700 € environ. Pour en arriver là, il faut de la rigueur et de la mutualisation des services le plus possibles.

L.P.B. : Tout cela malgré les efforts que le département doit fournir en matière d’aide sociale ?

S.D. : Oui, malgré les 30 M€ pour l’APA, 30 M€ pour le RSA, 30 M€ pour la PCH (1). Fin 2012, le RSA nous coûtait un peu moins de 20 M€, en 2016 : 30 M€. Et nous devons financer cela avec une baisse de 14 M€ cumulés de dotations de l’Etat en 2017. Mais honorer le volet social, c’est pour nous un sentiment de fierté et de la considération pour les gens qui en bénéficient. Nous le devons aussi par exemple pour les personnes âgées qui souhaitent rester chez elles. Nous avons aménagé 1.752 logements en 10 ans : fermeture des volets, aménagements d’escaliers, douches à la place de baignoires, etc.  C’est environ 1 M€ de travaux réalisés à 99 % par des entreprises locales…

L.P.B. : Reste-t-il de quoi investir ? Dans les routes, collèges ou Internet Très haut débit par exemple ?

S.D. : 20 M€ sont consacrés aux routes dans le budget 2017. Deux collèges seront restructurés, trois sont en travaux sur les 27 collèges départementaux. Pour développer et rendre séduisant le département aux entreprises qui souhaitent s’y installer – ou y rester – il faut développer le Très haut débit (THD). 75 M€ seront investis d’ici 2020, pour qu’au moins 70 % de la population ait accès au THD par fibre optique.

L.P.B. : Une des préoccupations majeure de tous les Berrichons est l’accès aux soins. En la matière, c’est de plus en plus compliqué de trouver des médecins…

S.D. : En 2006, il y avait 210 généralistes dans l’Indre. Dix ans plus tard, il n’en reste que 147, dont encore 10 à 12 vont prendre leur retraite dans les 10 mois qui viennent. Il y a 14 maisons de santé pluridisciplinaires dans le département, et c’est assez. Il faut cependant faciliter la tâche aux jeunes médecins qui veulent s’installer ici, les aider dans l’administratif, leur montrer aussi les atouts de l’Indre. Depuis un an, 8 nouveaux médecins ont ou vont bénéficier de 15.000 € de prime à l’installation.

L.P.B. : Cela nous amène à la visibilité touristique. L’Indre : une destination qui peut attirer des touristes ?

S.D. : Depuis 1994, on travaille sur la destination Berry. Nous avons accueilli 9 fois le Tour de France, 2 fois le Paris-Dakar, fin août prochain les Championnats du Monde de Tir sportif. Il y a 1 750 emplois liés au tourisme dans l’Indre, pour 30 M€ de chiffre d’affaires. Il y a donc un changement de mentalités sur le sujet. L’année dernière, les campings et chambres d’hôtes ont fait + 15 à + 17 % de fréquentation, par des gens qui cherchent le calme, la nature, un autre rythme. La politique commerciale de l’ADTI (Agence de développement touristique de l’Indre) y contribue beaucoup.

L.P.B. : Un an après votre élection comme président, comment avez-vous pris la fonction ?

S.D. : Nous sommes un groupe extrêmement soudé, et nous avons vécu des moments très forts et puissants au moment du décès de Louis Pinton (le 17/11/2016, Ndlr). Je suis élu depuis 1994, je connais bien la maison. Une fois que nous avons pris une décision, la solidarité et la rigueur sont totales. Cet état d’esprit fait que c’est assez facile. De plus, nous avons confié les postes stratégiques (économie et finances, routes, commande publique) aux femmes. Elles apportent du recul sur les choses, et une certaine dose de bonne humeur aussi.

L.P.B. : Quel regard portez-vous sur l’actuelle campagne présidentielle ?

S.D. : On parle plus des affaires que du programme, et ça me navre… Le seul parti qui me passionne, m’enthousiasme, c’est l’Indre. On fait du concret, et on essaie de respecter la parole donnée. Vous savez, je viens du milieu rural, je suis très attaché aux gens de la terre. Les agriculteurs acceptent de souffrir et de peiner, mais dans le désespoir ils sont prêts à aller aux extrêmes. Pourtant, le développement de la France ne se fera pas que dans des métropoles. La ruralité est source d’un développement très important. Il représente aussi l’espoir, l’envie.

Propos recueillis par Frédéric Sabourin.

APA : Aide personnalisée à l’autonomie. RSA : Revenu de solidarité active. PCH : Prestation compensation handicap.