Six cents bouteilles de valençay sous la mer


  

Jean-François a laissé du Symphonie 2017 et du Signature 2016 vieillir pendant un an au gré de la houle dans la Manche. Elles attendront juin 2019 au pied de la tour Thermidor à Saint-Malo.

Ce n’est pas une bouteille jetée à la mer comme message d’espoir, mais deux pallocks, chargés de bouteilles et de magnums de valençay blanc et rouge qui vont vivre une expérience de vieillissement sous la mer. Pourquoi a-t-on immergé ce vin de Lye ? Jean-François Roy, figure du vignoble de Valençay nous donne l’explication. « Le caviste de l’abbaye Saint-Jean à Saint-Malo est un de mes clients de 2000. Depuis quinze ans, il immerge des bouteilles et m’a proposé de tenter cette expérience. Ca n’avait pas été possible en 2017 mais cette année c’est le valençay qui va vivre cette expérience. Je suis allé procéder à cette immersion au début du mois. Elle succédait à du muscadet et du chinon que l’on a fait revenir à la surface ».

Le retour des pallocks est spectaculaire. Les bouteilles sortent de la mer enrobées d’une gangue marine faite de vase et de milliers de petits coquillages et doivent donc subir un bon nettoyage avant dégustation.

Cette année les pallocks avaient parfaitement tenu le coup, ce qui n’est pas le cas tous les ans. Immergés à une profondeur de quinze mètres à marée haute et cinq à marée basse ils sont brassés par la mer qui parvient à déplacer ces charges de plus de trois cents kilos. Un plongeur vérifie chaque mois l’état de cette cave marine.

Des bouteilles au bouchage hermétique

« L’intérêt de l’opération, précise Jean-François Roy, c’est justement d’obtenir un vieillissement accéléré. Le mouvement perpétuel de la mer et le fait que la température ne varie que de quelques degrés (entre 12 et 15°) sont les deux éléments intéressants. Le courant joue sur les bouteilles un effet de bâtonage, c’est à dire de mise en suspension des lies. C’est pourquoi le vin que l’on a immergé n’a pas été filtré ».

Une telle opération réclame un luxe de précautions. Les bouteilles sont équipées de bouchons particulièrement hermétiques, cirés puis capsulés afin que les vers marins ne les attaquent pas. Le but n’est évidemment pas de faire pénétrer d’eau de mer dans les bouteilles.

Cette méthode ne peut évidemment être qu’expérimentale. C’est le caviste qui prend le risque. Il achète les bouteilles et se charge de leur commercialisation. Elles sont revendues 50 € le lot de deux bouteilles : un rouge et un blanc.

L’opération de communication est spectaculaire, mais a-t-elle un caractère oenologique. Jean-François Roy a pu se faire une idée. « Honnêtement je n’ai pas trouvé un effet particulièrement spectaculaire sur le muscadet. La comparaison entre les bouteilles immergées et la même cuvée vieillie en cave m’a laissé dubitatif. En revanche l’effet sur le chinon est incontestable. On retrouve un vin rond aux arômes fondus dont l’acidité a disparu ».

Une dégustation événement en juin 2019

Il ne reste donc plus qu’à voir comment vont évoluer « Symphonie » 2 017 et « Signature » 2 018 que Jean-François a confié à la mer. Les bouteilles reviendront à la surface en juin prochain et le vigneron espère bien en récupérer une vingtaine pour organiser un évènement. « Nous avons un an pour trouver l’idée. Mais cet événement devra se dérouler à Châteauroux sous la forme d’une dégustation à laquelle sera conviée la crème des sommeliers. L’Indre compte suffisamment de grands noms de la profession pour entraîner leurs confrères. Ce serait une belle promotion pour notre valençay ».

Le message est lancé et Jean-François Roy est preneur de toutes les bonnes idées.

Pierre Belsoeur   


Le millésime 2017 dégusté à l’abri

La traditionnelle présentation du millésime, par les vignerons de Reuilly et Valençay avait cette année déserté les allées du Château Raoul pour cause de vigilance orange orage. Les vignerons et restaurateurs des tables gourmandes avaient donc trouvé refuge dans la salle des délibérations du Conseil départemental. C’est peut-être d’ailleurs la dernière fois que la manifestation organisée par le Département et les syndicats viticoles se tient à Châteauroux puisque le président Descout a fait part de son intention «d’aller découvrir le millésime chez vous ». Autrement dit la manifestation pourrait se dérouler une année dans les vignes de Reuilly et l’autre dans celles de Valençay. C’est vrai que l’on manque un peu de ceps à Châteauroux.

Francis Jourdain pour le valençay et Géraud Charpentier (qui palliait l’absence de Virginie Bigonneau mais n’envisage pas de lui succéder à la tête du syndicat) pour le reuilly, n’ont pas pris position sur le terrain de l’alternance. Ils se sont contentés de dire leur plaisir de présenter un millésime de qualité, malgré les aléas climatiques qui ont en particulier touché le vignoble de Valençay. Heureusement le printemps a cette fois été clément, laissant espérer un volume normal en 2018. «On croise les doigts, avoue Marc Daniel qui a sa propre cave à Reuilly depuis 2011. C’est la troisième année consécutive qu’il me manque un tiers de récolte. Avec une récolte normale je pourrais embaucher mon apprenti, qui ne demande que ça ». Il n’y avait pas que du vin à déguster au cours de cette soirée. La Brasserie du Luma en était l’invitée d’honneur et la Galloise Hannah Jones a dit en termes charmants son bonheur d’être devenue berrichonne de coeur en ajoutant la culture de la bière galloise au patrimoine berrichon.