BILLET D’HUMEUR de Fabrice Simoes


Quand je serai grand, je serai garde forestier du Maine

J’étais tranquille, j’étais peinard… Et je regardais les gardes forestiers du Maine (from US of course) qui s’encadraient dans mon écran de télévision. Vous ne connaissez pas les gardes forestiers du Maine ? Ce sont des gaziers habillés comme nos gardes forestiers mais avec des pick-up au lieu des Citroën et des hors-bords en guise de barques. Ils protègent les glouglous sauvages d’Obélix, les castors, et les éperlans. Des gars on vous dit que ça. Des Américains pures souches depuis trois générations, avant leurs familles venaient de l’Est, ou du Sud, voir du Nord ou de l’Ouest de l’Europe. Eric Marchand est l’un d’eux, et avec lui, on badine pas avec la longueur des épuisettes, la distance de tir sur un dindon et toutes ces sortes de choses. Les gardes forestiers du Maine, c’est un épisode, suivi d’un autre, suivi parfois d’un troisième sur une des chaînes de la TNT. Au fil des épisodes, au fil des amendes, et là ça douille grave même quand un touriste de passage pêche de bonne foi et que c’est le type du bar-tabac du coin qui vous a mal aiguillé, on apprend tout ce qu’il faut savoir sur les habitudes de vie dans le Maine et ses environs. Et aussi comment ça bosse un garde forestier du Maine. Ce sont des mecs capables de passer trois jours en planque et de faire une perquisition chez un quidam pour une dindon femelle tuée et pas déclarée. Ça, ça fait relativiser le casse du siècle. Cela range au rang d’amateurs tous les Spaggiari, les Zampa, et autres Mesrine, non ? Ou alors c’est l’ampleur des moyens mis en œuvre qui interpelle.
On regarde. On apprend. On rêve et on se dit que si on avait les gardes forestiers du Maine, la vie serait tellement plus simple et plus belle sous le ciel du Maine et celui d’ailleurs aussi.
Dans un premier temps, on aurait un président qui ne communiquerait que par bribes de 140 signes ou intervalles. Un type qui prendrait toutes les vessies pour des lanternes et, comme aurait dit Pierre Dac, finirait par se brûler. Un Trump en quelque sorte… Ensuite, on construirait un mur pour empêcher que les gens des autres continents, des autres religions, viennent nous influencer. On se la jouerait façon Erdogan et on déciderait que l’apparition de la vie et l’évolution selon Darwin c’est bien trop compliqué pour les enfants, Turcs ou pas Turcs. On n’est même pas certain que ces travaux, « vieux et mauvais » selon les hautes autorités universitaires du côté d’Istanbul ou d’Ankara, réalisés par un Anglais en plus, ne soient juste une perversion de la morale religieuse, chrétienne tout autant que musulmane ou hébraïque.
On prendrait un garde forestier du Maine pour s’occuper des normes alimentaires et même un végan pour défendre tous les animaux, y compris les oies gavées du Périgord et les glouglous sauvages. Les premiers s’emploieraient à réduire les procédures, à faire fabriquer des fromages aseptisés, à obliger les agriculteurs à acheter leurs graines chez Monsanto, le grainetier qu’il vous faut. Le second s’occuperait d’interdire la traite mécanique et on obligerait les fermières à mettre des moufles pour ne pas stresser le pis des vaches. A plusieurs gardes forestiers du Maine, ils construiraient une arche de Noé du Maine pour mettre tous les couples d’animaux de la planète, en vue de la destruction possible – avec Trump on ne sait pas trop – de la couche d’ozone. On la construirait avec des matériaux qui résistent à l’eau et aux pluies acides. Des matériaux que l’on ne connaît pas encore mais que les gardes forestiers du Maine vont bientôt trouver tellement ils sont forts.
Manu, le notre à nous pour cinq ans, et plus si affinités, est déjà en avance quant à lui. Il s’est entouré de vrais gardes forestiers du Maine. Il les englobe sous un label presque identique à celui d’un groupe de rock alternatif, LREM. Musicalement, on ne sait pas trop ce que cela peut donner vu que la maison de disque vient juste de démarrer ses séances d’enregistrement au palais Bourbon. Avec ses 351 musicos-apôtres-gardes forestiers du Maine, Manu va propager la bonne parole. Celle qui dit qu’il faut pourfendre et débusquer les mauvais chasseurs de glouglous et les vilains pêcheurs d’éperlans, les Anglais du Brexit, les Barbus de l’EI, les kippatés à guirlandes, les soutanés à croix de bois, croix de fer, si je mens je vais en enfer, les Rouges du Kremlin, les Bleus sans les casques, les punks à chiens, etc ! Ce n’est qu’après ça que le glouglou sera de retour en abondance, comme les éperlans et les castors, même si pour les castors c’est simplement pour faire genre fun dans la nature. A partir de là, et seulement à partir de là, le peuple du Maine pourra manger à sa faim et chanter ses louanges.
Si vous ne me croyez pas, regardez des épisodes consacrés aux gardes forestiers du Maine. En replay si vous voulez. En cas d’insomnies, c’est aussi efficace que de compter les moutons, ou de regarder un grand prix de F1.
C’est simple, quand je serai grand je veux devenir garde forestier du Maine… ou alors dans ma prochaine réincarnation.

Fabrice Simoes