C’est la magie de Noël


Au moment où vous lirez ces lignes, il ne restera que quelques dodos – unité de mesure utilisée par les parents afin d’envoyer les enfants au lit pour attendre le passage de la petite souris ou du Père Noël, voire de la dame qui vient faire la piqûre pour pas être malade- avant le matin du grand remplacement. À l’inverse de celui annoncé par Renaud Camus, un ami de Monsieur Z, celui-ci possède l’avantage de ne pas durer.
Vous connaissez tous ce matin-là. C’est celui qui transforme le sol du salon en grande poubelle horizontale pour boites et papiers cadeaux. Quand on voit le plongeon sur ces papiers-là et ces cartons déchirés, on se demande parfois si ce n’est pas l’emballage la partie du cadeau la plus importante. Le cousin Gaston, pilier de bar assumé, tient à préciser qu’il en est de même chose avec les femmes. Laissons à ce goujat la paternité de cette réflexion d’un autre temps, d’une autre culture. Preuve que le sexisme ne connaît pas de trêve, Noël inclus. Quant à la magie, selon Gaston, c’est toute l’année : au fond de verres de blanc le matin, au Balto, de gros rouge du Café de la poste, l’après-midi. Et pour les réseaux sociaux, qu’importe le zinc et l’heure, c’est toute la journée.
Revenons à la magie de Noël. Celle d’enfants aux yeux pétillants comme les bulles d’une bouteille de champagne que tonton Roger vient d’ouvrir en envoyant péter le bouchon dans les lunettes de tata Suzanne. Faut toujours qu’il fasse le malin tonton Roger. À se demander, des fois, s’il ne fait équipe avec le cousin Gaston. Donc, l’ambiance des fêtes de fin d’année, et les jours imposés d’agapes itou, varie selon les humeurs du moment. Festive ou vasouillarde, familiale ou solitaire, gastronomique ou diététique, telle est la période. Elle peut être triste et mélancolique comme un fado d’Amalia Rodrigues, enjoué à la manière de la danse des canards façon JJ Lionel ou la chenille de la Bande à Basile. C’est toujours une histoire d’ambiance. C’est le Petit papa Noël de Tino Rossi ou le All I Want For Christmas Is You de Mariah Carey. Ce peut-être aussi le sirupeux Noël Blanc de Bing Crosby ou Franck Sinatra pour le 25 décembre et le Can’t Take My Eyes Off You des Four seasons et Franky Valli, le Madison obligatoire du réveillon du 1er de l’an. C’est chacun sa version on vous dit. Quelle que soit la musique, une certitude, Noël c’est toujours le 25 décembre et on n’a jamais vu l’année commencer un vendredi 13. Vous pouvez vérifier, ce n’est jamais arrivé. Ça porte malheur paraît-il.
La question, en cette fin d’année, n‘est pas comme dans le titre du film de Sandrine Veysset « Y aura t-il de la neige à Noël ». À voir. Que nenni. La préparation des fêtes version 2021 amène plutôt une questionnement dans le genre « Noël on l’aime ou on le quitte … » Une version de la magie de Noël restrictive, réductrice, castratrice même. Une version où on se demande ce qu’elle peut bien faire de ces journées, la mère Noël, tant y en a que pour le Père Noël. Civilisation patriarcale va. Les spécialistes de la mode et de la coquetterie réunies expliqueront que le rouge ça ne va pas à tout le monde. Mais le monde ne se limite pas seulement en une partition homme et femme. On peut toujours essayer de séparer le bon grain de l’ivraie on ne peut pas séparer les cons du reste de la population… Comme tout à chacun est, à un moment donné, le con de l’autre, on se retrouve automatiquement tous ensemble. Tous ensemble. Comme dans une manif de la CGT d’avant l’égocentrisme affirmé !
Qu’on se le dise, Noël est définitivement une manif où tout le monde adhère sans s’occuper de son voisin. Surtout si son voisin vient d’ailleurs. Vous me direz que, désormais, dans l’esprit du commun des mortels, ceux d’ailleurs sont parfois simplement ceux qui sont installés sur le trottoir d’en face. Si jamais, au lieu de passer de l’autre côté de la manche, quelques uns avaient l’idée saugrenue de traverser la rue …
C’est pas tout ça, au cas où y en aurait un qui se pointe, planquez les huîtres, le foie gras et la dinde au frigo. Déjà que vous aurez certainement tonton Roger, tata Suzanne, et peut-être le cousin Gaston, à votre table. Les supporter, c’est probablement un bout de la magie de Noël !

Fabrice Simoes