Chambre des Métiers et de l’Artisanat : Le paradoxe de la recentralisation


La France, en plus de son titre d’Absurdiland ou Absudistan donné par d’autres pays, cultive le paradoxe sans fin. La preuve en est fournie avec la dernière assemblée générale de la Chambre de Métiers et de l’Artisanat de Loir-et-Cher (CMA 41), à La Maison des Entreprises de Blois …
Ça sentait, la veille de Noël 2020, non pas le sapin, mais l’encens pour une genre de veillée mortuaire au sein de laquelle flottait plus un regret nostalgique qu’un bondissant engouement pour un avenir, que l’on souhaite radieux certes, mais qui, avec la crise, s’annonce des plus sombres. Et, alors que depuis le matin-même, s’enflait l’annonce de sa retraite, le préfet Yves Rousset n’a rien voulu laisser transparaître car son futur départ aurait encore plus plombé les débats tant cet représentant de l’État avait su se faire apprécier en moins de deux ans, «n’hésitant pas à effectuer, incognito, chaque samedi, son marché au centre-ville, pour aller à la rencontre des commerçants».Tous les orateurs ont pourtant souligné les bienfaits de la proximité et du travail de terrain, avant que ne soit plus que confirmée la mort de ladite chambre consulaire en tant que départementale pour rejoindre la collectivité régionale, à Orléans, siège, depuis le 2 janvier, de la Chambre de Métiers et de l’Artisanat Régionale (CMAR). Aucune réaction n’a accompagné cette fin annoncée et programmée, hors celle du sage Richard Stobienia, qui a souhaité une cérémonie d’au-revoir, avec la présence des trois anciens présidents encore vivants (il va falloir faire vite…), à savoir Jean Mouzay, Jean-Paul Marchau et Pierre Maino, pour la disparition de l’honorable dame condamnée à l’âge de 83 ans. Après cette oraison funèbre, aucune date n’a été retenue pour cette «messe-souvenir» qui, espérons-le, n’aura pas lieu à Orléans… Stéphane Buret restera donc le dernier président à avoir exercé, avec son équipe, ses responsabilités à la tête de la CMA41 dont il regrette la disparition, sans pour autant contester les applications de la loi, « même si je le fais avec tristesse et nostalgie», qui va regrouper les CMA des six départements et les quatre CFA, dont ceux de Blois, et en se montrant fier de transmettre un budget sain positif de 645 000 euros environ, après fin des travaux entrepris sur le site départemental. Au nom de la CCI 41, le président Yvan Saumet regrette, lui aussi, cette réforme qui va éloigner les élus de terrain de leurs bases départementales, en reconnaissant toutefois qu’en Seine-Maritime, département qu’il a fréquenté, il y avait plus de six Chambres! Entre le trop-plein et presque plus rien, il y a là un paradoxe qui va casser le travail de proximité en circuits courts des permanents de la CMA qui vont être moins proches des professionnels à aider et conseiller, tout comme leurs collègues de la CCI.

Proximité, qu’ils disaient….
Et même si le mot n’a pas été prononcé, on risque de voir certains départements devenir plus gloutons que d’autres, vu leur population et leurs forces vives, pour être tentés de «manger» un peu les autres, plus faibles… Même son de cloche patriotique chez Marc Gricourt, le maire de Blois, mais aussi le vice-président de la Région, qui souhaite que tout se passe pour le mieux pour les artisans et commerçants inscrits au registre des métiers, tout en jouant la carte de la régionalisation déjà appliquée dans le domaine des CFA dont le futur de Blois programmé pour toute la région Centre-Val de Loire… Yves Rousset a rappelé, chiffres à l’appui, sa solidarité affectueuse aux professionnels impactés par la crise qui dure tout en soulignant les dossiers soutenus par l’État pour aider ou tenter d’aider des entreprises de toutes tailles fort maltraitées sur le plan économique. Pour l’instant, il n’y a aucune crainte annoncée pour le personnel (une centaine environ en Loir-et-Cher avec les CFA), mais il y aura, mutualisation oblige, moins de postes administratifs et de gestion, mais plus de postes développés pour aller à la rencontre, sur le terrain, avec les chefs d’entreprises, mais aussi les élus des collectivités locales. La première assemblée régionale a eu lieu le lundi 11 janvier à Orléans (120 km AR pour les élus du Loir-et-Cher et 240 km pour ceux d’Indre-et-Loire!), ce qui fera tourner les moteurs et donc l’usure des véhicules (c’est bon pour les garagistes s’il en existera encore) et entraînera encore plus de frais de déplacements. Il va falloir, vite, revoir le sens du mot proximité dans le langage consulaire et dans d’autres domaines aussi. C’est le paradoxe français qui débouche sur l’Absurde. Mais, on aime ça dans notre pays cocardier représenté par un coq, qui, comme ses congénères, adore fouiller et gratter le sol, avec ses pattes. La date de la cérémonie d’adieux à la CMA 41 (sur le parvis de la Maison des Entreprises, si la Covid-19 persiste encore longtemps) n’a pas encore été définie. Elle aura lieu sans le préfet Yves Rousset, c’est sûr!

Jules Zérizer