Christine Vallin aux petits soins pour Pier Augé


La marque de produits de beauté Pier Augé est née en 1961 à Monaco, l’entreprise s’est installée à Châteauroux en 1967. Elle a failli disparaître en 2011. Christine Vallin et sa fille Marine lui redonnent des couleurs.
Vous reprendrez bien un soupçons de malachite ? Il existe un endroit, à Châteauroux, où l’on met les pierres semi-précieuses en tubes. Enfin de la malachite en poudre et non sous la forme où vous avez pu la croiser en visitant les monuments de Saint-Petersbourg. L’endroit en question ne se pousse pas du col. Pour le trouver, il faut savoir exactement ce que l’on cherche. Et pourtant la marque Pier Augé est connue dans le monde entier et symbolise le chic français.
Coïncidence berrichonne

Elle n’est pas la seule évidemment. Sa particularité c’est d’être indépendante. « Nous sommes une entreprise de luxe artisanale » se plaît à rappeler sa nouvelle patronne : Christine Vallin. Et c’est bien cette indépendance et cette taille qui ont failli valoir à Pier Augé d’être rayé du monde des produits de beauté français.

Une sorte de miracle berrichon. « Je suis parisienne, mais depuis 1998 j’ai une résidence secondaire dans l’Indre. En 2011 le hasard a voulu que l’on me rachète la société d’administration de biens que je possédais en région parisienne au moment où ma fille Marine découvre dans la presse le plan de sauvegarde de Pier Augé. Je n’ai alors aucune connaissance de cosmétique, Marine si, elle est ingénieur dans cette partie. En revanche je suis expert comptable. Nous nous sommes donc plongées dans le dossier en juin Pier Augé avait été une belle entreprise mais au bout de onze années de dégringolade elle était sur le point de plonger. Heureusement qu’elle était à Châteauroux. Devant le tribunal de commerce de Versailles par exemple elle aurait été à coup sûr liquidée. Nous avons obtenu un premier jugement du tribunal de Châteauroux en 2011 nous désignant comme repreneurs. »

Secouez-moi secouez-moi
Ensuite, comme dans toute reprise il a fallu régler les problèmes sociaux, réorganiser le travail. S’il y a eu des départs on ne peut pas parler de « dégraissage » puisque des 33 salariés effectivement dans l’entreprise en 2011 on est passé à une quarantaine. « Avec une pyramide des âges étonnante, souligne Christine Vallin, puisque les plan sociaux successifs avaient fait partir ceux qui coûtaient le moins cher à licencier : les plus jeunes. »
Du coup l’entreprise est constituée de très jeunes salariés et d’anciens « Nous avons procédé à des embauches dans ou a proximité du département, et fait aboutir le plan de sauvegarde, se félicite la PDG, avec l’aide de Jerôme Gutton, heureusement que le préfet de l’Indre a été à nos côtés pour dénouer les blocages administratifs. »

Il ne fallait pas manquer de dynamisme pour se lancer dans l’aventure financière, redonner l’envie au personnel de se battre, recréer une charte graphique mais aussi apprendre les rudiments du métier même si elle a une équipe technique autour de sa fille pour penser, composer, fabriquer et améliorer les produits. « Lorsque j’achète un flacon d’huile essentielle de rose de Damas à 10.000€ le litre il faut au minimum que je sache à quoi ça sert. »
Et lorsque Christine Vallin parle d’artisanat et de mobilisation du personnel, elle a une excellente anecdote pour illustrer ses propos. « Nous avons lancé treize nouveaux produits depuis la reprise et la veille du lancement d’Epices et Moi nous avons constaté qu’il y a avait un problème avec l’émulsion : l’eau et l’huile qui composaient cette émulsion se désolidarisaient. Tout le personnel a été rappelé et nous avons passé le dimanche de la fête des mères à secouer Epices et Moi. Par la suite, le problème de fabrication a été réglé, mais là c’est toute l’entreprise qui a sauvé ce lancement.
Exploitation en positif

Christine Vallin est en train de faire son trou dans le monde de l’entreprise castelroussin, c’est elle qui préside le jury des femmes entreprenantes au sein d’Initiative Indre. Elle a conscience d’avoir remis Pier Augé sur les bons rails mais « L’image est plus belle que la réalité. Toutes les graines n’ont pas encore poussé. Nous n’avons pas de problème de chiffre d’affaire, mais de dette à apurer. On se bat pour maintenir le chiffre, l’export va bien, les fondamentaux sont sains, mais on peut toujours mourir en bonne santé. Cela dit l’exploitation est en positif et la baisse de l’euro est la divine surprise au moment de répondre notamment à un appel d’offre dans l’aérien. »
Christine Valin a redonné des couleurs à Pier Augé, mais elle sait bien que le rétablissement de la marque donnera tôt ou tard de l’appétit aux gros groupes de l’industrie du luxe. « Il ne reste plus que deux sociétés indépendantes à capitaux familiaux en France. » En attendant, cette pépite, issue des fonds de réindustrialisation injectés dans l’économie castelroussine au moment de la fermeture de la base de l’OTAN, redevient peu à peu un des ambassadeurs de l’économie locale.

Pierre Belsoeur