Flirter avec les nuages… beauvaliens


Les mois de mars et d’avril ne sont pas juste annonciateurs du printemps. Ils sont aussi synonymes d’arrivées de nouveautés au zoo de Beauval.

« I believe, I can fly », “fais comme l’oiseau”… Autant de ritournelles qui viennent à l’esprit, une fois embarqués en avant-première dans l’une des cabines du téléphérique privé du zoo de Beauval. Ce nouveau « jouet » aura coûté la bagatelle de 8 M€ à la famille Delord qui ajoute une raison supplémentaire de se déplacer au zoo. Après les pandas puis leur bébé, les hippopotames, les loups, et également des présidents de la République en goguette, de François Hollande à Nicolas Sarkozy, en passant par Emmanuel Macron et même, Brigitte Macron en bonne fée marraine au-dessus du berceau du petit ours noir et blanc, Yuan Meng, et avant les diables de Tasmanie ce mois d’avril 2019… On ne compte plus les surprises pharaoniques annuelles made in Beauval.  Cette fois, c’est la tête dans les nuages que nous nous serons déplacés à Saint-Aignan. Pas besoin de plan à l’accueil proposé à maintes reprises par l’hôtesse, nous connaissons à force le site par coeur; si elle le pouvait, notre automobile s’y conduirait toute seule, tant nous avons arpenté ces lieux. Alors, heureuse ? Après avoir vogué sur le « nuage de Beauval » pendant un peu plus de 4 minutes – le nom de baptême du téléphérique aux 24 cabines (huit places chacune) dont 8 au plancher de verre qui permettent de réaliser une photo souvenir de ses pieds originale, construit par la société haut-savoyarde Poma, leader mondial du transport par câble – on pourra certifier que ça plane ! Un air de vacances (sans la neige), un voyage apaisant depuis les éléphants vers les lions en passant par les gorilles et la mini-ferme, en aller-retour, et une bonne vision d’ensemble en prenant de la hauteur (45 mètres exactement) sur ce vallon nichant un dôme tropical en construction et surtout des pensionnaires à poils, à plumes, à pattes, à trompes et à nageoires. Au-dessus de la piscine des otaries, nous serions pratiquement tentés de plonger en contrebas pour rejoindre leur majestueux ballet, mais sans maillot de bain, trop risqué !

Un “nuage” qui affiche son prix, PETA France dénonce

Plus sérieusement, pour toucher ce septième ciel (à raison de 2 400 personnes accueillies dans les nacelles par heure), il faudra accepter de débourser un peu plus pour le billet d’entrée, soit 32 euros pour les grands et 26 euros pour les culottes courtes (de 3 à 10 ans). « Nous augmentons ce tarif chaque année de toute façon, pour assurer le fonctionnement normal du zoo et les frais inhérents, » a justifié Samuel Leroux, responsable des achats, des points de restauration et de la télécabine. Le public aura, lui, décollé à son tour, samedi 30 mars, jour d’ouverture officielle de cette nouvelle installation hors sol. Avec toutefois une question en lévitation, une fois les pieds de retour sur la terre ferme : un « nuage » loir-et-chérien, commercialement offensif face à la tyrolienne du parc parisien de Thoiry ? Dans la course aux nouveautés pour attirer les visiteurs dans les zoos, cela semble la jungle concurrentielle … Passée l’euphorie de l’inédit, une autre interrogation taraude : et le bien-être animal ? Le nouvel hôte aérien n’est-il pas incommodant pour la quiétude des animaux captifs ? Rodolphe Delord, directeur beauvalien bâtisseur, fils de la créatrice créative Françoise, a certifié. “Je sais que certains vont crier au loup mais j’ai justement choisi un système de poulie et un moteur les plus doux possibles pour ne pas les perturber.” Ce qui n’aura pas empêché l’association PETA France de monter au créneau câblé, fustigeant par voie de communiqué. « Plutôt que d’investir 8 millions d’euros dans une installation qui creusera davantage l’écart entre les humains et les animaux prisonniers exploités par le parc, le zoo de Beauval ferait mieux de soutenir des projets qui aideraient réellement les espèces en danger dans la nature (..) Il existe pour les personnes souhaitant promouvoir chez leurs enfants le respect pour tous les êtres, des activités en famille qui ne cautionnent pas la souffrance d’individus sensibles : l’observation d’animaux dans leurs milieux naturels, les documentaires sur les animaux sauvages et les visites de refuges animaliers n’en sont que quelques exemples. » La jungle… Qui aura le dernier rugissement ?

Emilie Rencien