Je déconfine, tu déconfines, il ou elle déconfine …


Il aura suffi d’une chauve-souris, une seule, mordeuse de pangolin, un seul, bouffé par un Chinois, un seul, pour mesurer à quoi tient l’économie mondiale et la vie en société. Les chauve-souris ne manquent pas encore, et, en Chine, les Chinois n’ont plus ! Le nombre de pangolin est limité mais ça craint pour l’avenir…
Depuis mars, les soignants en général sont héros et pestiférés à la fois, applaudis à chaque balcon, à 20 heures, et vomis anonymement toutes les autres heures de la journée. Maintenant, là où ils demandent à être plus nombreux, on leur promet des primes et une médaille. Là où ils demandent à pouvoir se reposer et prendre leurs congés en retard, on leur promet l’aménagement des 35 heures et des chèques vacances financés par d’autres salariés. Là où ils demandent à ne pas fermer des hôpitaux, à ne pas vider les salles, à ne pas supprimer de lits, à ne pas faire de la santé une simple marchandise, on leur promet rien si ce n’est un grand « Ségur de la santé ». Une pantonyme menée par Nicole Notat, ancienne dirigeante CFDT dont le passage syndical a été marqué par la signature de tous les accords de la « Refondation sociale » de 2000, lancée par le Medef.
Trois mois où nous avons découvert les bienfaits de la course à pied, de la marche, de la sortie du chien matinale et/ou tardive, et de l’achat compulsif de papier toilette. On s’est rendu compte que le confinement devenait sérieusement long lorsque les questions existentielles sont apparues. Quelle distance peut parcourir, en volant, une mouche, en une journée ?
Il s’en est passé des choses. Les éboueurs et les hôtesses de caisses des supermarchés sont passés d’invisibles à héros du quotidien aux yeux de quidams calfeutrés dans leurs chez-soi. Les instits et les profs ont changé de statut aussi. « Trop chers payés » et « toujours en vacances » devenus Saints après que les chers parents aient compris que leurs progénitures ne seraient certainement pas les chercheurs de vaccins de demain. Les « mis au chômage partiel » ont pu goûter aux joies du fonctionnariat et ses 16 % de salaire net en moins. Tous fonctionnaires pendant deux mois. Tous privilégiés, tous cheminots, tous agents EDF ou des impôts. Un rêve, un cauchemar, une réalité. Dans nos villes et villages, nous sommes retournés chez les petits commerçants et vu que le boucher affichait des pieds et des oreilles de cochon, des joues de bœufs et sa poitrine de veau sans que cela ne modifie en rien son physique même s’il faisait l’andouille à en tomber par terre.
Les réseaux sociaux, une fois encore, ont débordé de scientifiques de comptoir, experts en tout et en rien. Ils ont validé que les ânes ne savent que braire. Le vide-ordure de la connerie humaine a été vite saturé ! Chassez le naturel et il revient au galop. 75 ans après, les délateurs ont retrouvé les habitudes inculquées par leurs parents ou grand-parents. On conserve toujours quelque chose d’une bonne éducation. Même après des années, même après avoir sauté une ou deux générations, les salauds restent des salauds.
Avant le déconfinement final, et surtout avant que ça se voit trop, nos élus en ont profité de la loi Avia pour brider la liberté d’expression. Sous couvert d’une morale pré-mâchée on ne pourra bientôt plus dire ou écrire, comme Guy Bedos « Qu’il soit blanc, noir, juif ou arabe, un type bien est un type bien et un enfoiré ce sera toujours un enfoiré », alors que si l’on ne sait pas pour le coronavirus, il est certain que les enfoirés seront toujours là demain.

Fabrice Simoes