L’art urbain fait villégiature en Sologne


Comme en 2019, la Biennale de Sologne 2021 débute par le parcours Artrimoine où l’art urbain a été mis à l’honneur. Depuis le 2 juin, 8 artistes ont réalisé des fresques dans 8 communes de Sologne. Zoom sur trois réalisations, représentant trois courants de l’art urbain : le graffiti créé aux Etats-Unis dans les années soixante, le muralisme né en 1910 au Mexique, et le pochoir fondé par des artistes français dans les années soixante.
À Yvoy-le-Marron, Sêma Lao a réalisé une œuvre à la bombe, en prolongement de la fresque de Théo-Lopez, réalisée il y a deux ans sur le mur des ateliers municipaux et du local des pompiers en face de l’école, à qui elle a su donner une reconnaissance, malgré un style très différent. Née à Limoges d’une mère allemande et d’un père chinois, Sêma Lao a « toujours dessiné car j’ai grandi très isolée. Après le crayon à papier, je suis passée à la peinture en représentant beaucoup d’animaux. Comme mon petit frère était rappeur, j’ai fait des rencontres dans le milieu du hip hop en commençant par illustrer des pochettes de disques avant de me lancer dans l’art urbain. L’enfance est un thème qui me tient à cœur car j’ai eu une enfance un peu difficile, même si maintenant j’aborde aussi d’autres choses. Peindre des enfants est une partie de moi avec mes états d’âme et une certaine nostalgie. Je travaille d’après des photos et j’improvise en choisissant des couleurs acidulées. J’ai choisi pour ce mur que j’ai réalisé en 3 jours des modèles qui me plaisaient sur un thème floral qui m’a été inspiré par le fait que j’ai été hébergé chez Nils Aucante qui est apiculteur. J’avais prévu de réaliser trois petites filles mais comme il restait de la place sur le mur, j’ai ensuite rajouté un petit garçon, ce qui complétait bien la fresque qui est bien placée en face de l’école. Je trouve cela intéressant d’amener l’art urbain à la campagne. J’ai déménagé en Corrèze il y a 3 ans pour être au vert car je pratique mon art en ville et j’avais envie de nature. »

Louyz
À Marcilly-en-Gault, la fresque réalisée il y a deux ans sur le mur de la caserne des pompiers par FernandKayzer et qui malheureusement ne faisait pas l’unanimité dans le village, a été recouverte afin de laisser le champ libre à Louyz qui a réalisé son œuvre en deux jours et demi. De son vrai nom Louise Delarue, Louyz est issue d’une famille de muralistes car son grand-père Fabio Rieti a été l’un des pionniers de l’art urbain en France en réalisant notamment les trompe-l’œil dans le quartier des halles. La fille de Fabio, Leonor prit ensuite le relais avant de travailler avec sa propre fille Louise. « Pour la fresque de Marcilly, j’ai choisi des animaux typiques de cette région en y rajoutant de la poésie, indique Louyz. Je représente beaucoup de lézards sur mes murs car c’est un animal grimpant et un peu mon fétiche mais je n’avais jamais représenté de salamandre. Comme j’aime peidre en grand format des animaux de petite taille, j’ai aussi choisi le martin-pêcheur. J’aime peindre au pinceau car contrairement à la bombe, cela me permet de créer mes propres couleurs et à l’origine, la peinture murale se faisait au pinceau. Pour peindre, être en compagnie de ma mère avec qui nous restaurons les œuvres de mon grand-père, est très motivant et utile pour se passer le matériel. Maman sait exactement ce que je veux, c’est mon binôme car nous travaillons ensemble tous les jours. Je souhaite que les enfants regardent mes œuvres en souriant et se détachent des écrans en s’intéressant à ce qu’il se passe autour d’eux. Je souhaite que la fresque demeure et que si je reviens dans dix ans, j’aurai plaisir à la revoir. »

Nice Art
Ariane Pasco et Dominique Decobecq ont réalisé la fresque située sur le local de stockage associatif à Pierrefitte-sur-Sauldre sous le pseudo Nice Art, étant tous deux originaires de Nice. « Nous travaillons ensemble depuis 1986, toujours au pochoir qui a l’avantage d’être fait très rapidement, ce qui était pratique à l’époque où le street art était interdit. Nous avons toujours choisi des murs peu esthétiques afin de leur redonner vie. Nous faisons cela pour le plaisir, ce qui nous laisse une certaine liberté (Ariane et Dominique sont respectivement géologue et vulcanologue). Comme nous aimons mêler la peinture et la poésie sur nos fresques, nous avons cherché un poème parlant de la Sologne et nous avons trouvé « Fuite en Sologne » qui incitait à découvrir la Sologne. Nous avons choisi des extraits qui correspondaient à ce que nous pensions de la Sologne en retenant son aspect poétique et mystérieux tout en choisissant quelque chose de doux car notre fresque est derrière le cimetière, d’où les papillons, les fougères, les oiseaux et les petits animaux qui accompagnent les textes.»

Un musée à ciel ouvert
« Il y a deux ans, quand j’ai proposé aux mairies de mettre des murs à disposition, j’ai reçu un accueil très favorable et j’en ai été agréablement surpris car souvent en zone rurale, on assimile l’art urbain à des graffitis sans intérêt, se réjouit Gilles Maddelena, vice président de l’association Sculpt en Sologne organisatrice de la Biennale . Les artistes ont réalisé un travail remarquable avec des œuvres très variées. Entre les Biennales 2019 et 2020, il y a aujourd’hui 20 murs à découvrir, ce qui constitue un véritable parcours artistique à travers la Sologne. L’art urbain représente un musée à ciel ouvert gratuit pour les visiteurs. Quant aux maires, ils se réjouissent de la qualité des œuvres réalisées, à l’exemple de Daniel Lombardi, maire d’Yvoy-Le-Marron : « J’espérais que la fresque soit belle mais elle ne l’est pas car elle est magnifique. Je regrette que le mur ne soit pas plus grand. Ces fresques font que nous conserverons le bâtiment en le rénovant pour le mettre en valeur. » Agnès Thibault, maire de Marcilly-en-Gault confirme « Comme la fresque de Louyz fait l’unanimité, nous choisirons un autre mur dans deux ans. ».
F.M.
Pour découvrir le parcours Artrimoine : www.sculptensologne.com


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