Le temps des amis imaginaires


Comme déjà indiqué par le passé, mon moi est souvent concurrencé par mon surmoi, celui qui habite dans la chambre de bonne, caché sous les combles. Alors que l’un, le plus logique, le plus éduqué, prend le plus souvent le dessus, l’autre fait quelquefois le pataquès dans tout l’immeuble. Sa grosse voix se fait entendre, pas comme celles entendues par Jeanne d’Arc, pas celles de Bernadette Soubiroux, pas celle d’un éventuel potentiel prophète, messie, archange et tutti-quanti. Un psy dirait que c’est la faute à Pierre, Paul, Jacques. Ma femme, ma mère, mes frères et mes sœurs, ho, ho, estimeraient plutôt qu’il faudrait ranger sa chambre de temps en temps !
C’est probablement ce que les parents de l’assassin de la cathédrale de Nice doivent se dire : «  on aurait dû lui dire de ranger un peu mieux son souk là-haut ». Trois morts parce qu’un ami imaginaire lui a fait se toucher deux fils dans la tête, ça fait beaucoup. Ça fait trop. Quand on est petit, on peut s’inventer un monde avec plein de gens dedans. Des amis qui vous parlent et à qui l’on parle en interne c’est quelque chose d’important quand on est en âge de croire au Père Noël et que l’on vit dans le monde des Bisounours. Quant à avoir des amis imaginaires qui dictent votre conduite à tenir c’est une autre histoire. Parce qu’un ami imaginaire aurait rencontré un voisin du voisin du voisin qui aurait vu un ours bouffer le facteur, on égorge, on tue, au nom d’une religion ou d’une autre,… La religion, les religions, sont autant d’alliées plus ou moins intentionnelles des dictateurs, ceux qui utilisent toujours les amis imaginaires pour manipuler les masses. La récupération du soixante-huitard « l’imagination au pouvoir » contre d’imaginaires ennemis réels voilà leur credo. Ce n’est pas Bolsonaro qui dira le contraire, éteindre un feu par le feu est une méthode utilisée depuis que le feu existe. Tous les despotes se servent de cette diversion pour mettre sous l’éteignoir les incendies qui s’allument aux divers coins de leur propre pays.
Quand Recyp voue aux gémonies not’Manu, le drapeau tricolore et autres symboles français, sous couvert de caricatures blasphématoires, il fait oublier à ses meilleurs sujets la chute de la livre turque. Quand il appelle au boycott des produits français, il oublie que les chocos BN sont sous contrôle du groupe Yıldız Holding. On ne lui donne plus la recette et ça va vite se calmer… Dans une période de confinement où les salariés du privé ont le chômage partiel payé par l’État, on peut même nationaliser la Biscuiterie Nantaise et pi c’est tout. Quand Jean-Michel Blanquer fait dans l’à peu près et présente un visage que ne renierait pas la fachosphère avec son islamo-gauchisme et pas un protestanto-droitisme ou un judéo-centrisme il ne veut que masquer les incompétences d’une certaine élite politique à défendre la laïcité…
Tout cela vient se greffer à un merdier mondial où personne n’est véritablement épargné. La nature a horreur du vide, elle peut aussi avoir peur de sa propre fin et se créer un signal d’alerte visible de tous. Sans entrer dans une théorie complotiste, il est ainsi possible de considérer que la Covid 19 n’est pas autre chose que le signe visible d’une fin de cycle, celui de la consommation à tout va, celui du consumérisme excessif et de la dilapidation des ressources. Cette année, nous avons atteint le jour du dépassement, celui à partir duquel nous consommons plus que ce que la planète seule produit, au mois d’août. En 2019, il avait été établi en mai… On pourrait, peut-être, considérer que ces quelques semaines de gain sont autant de jours de gagner pour les générations futures, celles à qui l’on promet de rembourser une dette qui n’existe que sur fond de Cac 40 et d’annonces de Wall Street. Des générations qui ne pourront pas compter sur un homme, ou une femme, providentiel. Depuis la semaine dernière, ce n’est plus possible. James Bond sauveur de notre monde, c’est foutu. La preuve est apportée que si les diamants sont éternels les acteurs ne le sont pas. Sean Connery, a ceint son dernier kilt. Le seul et vrai 007, mais pas l’unique, n’était simplement qu’un homme qui voulut être roi… À moins qu’en bon Écossais, il ne revienne, au nom du chardon et pas de la rose, en Spectre !

Fabrice Simoes