Neung-sur-Beuvron : Retour aux sources


Le 16 août, dans le cadre d’un voyage en France, Jean-Serge Bokassa, fils de Jean-Bedel Bokassa est venu visiter, non sans une certaine émotion, le domaine de Villemorant qui avant de devenir l’Ecoparc était l’une des cinq propriétés solognotes de l’ex-empereur centrafricain. Il était accompagné du réalisateur solognot Xavier Gasselin, auteur du documentaire « Bokassa 1er, roi de Sologne ».
« Je n’ai pas de souvenir de Villemorant, indique l’homme politique centrafricain même si j’en ai beaucoup entendu parler. Cela ne me laisse pas indifférent de savoir que mon père était dans ces lieux, il y a quarante ans. Nous les enfants, étions seulement de passage en France car nous étions élevés en Suisse (pour sa part, Jean-Serge est parti en Suisse à l’âge de trois ans). Je suis venu cet été en France pour venir voir ma fille qui est étudiante à Paris et j’avais besoin de souffler. »

La démocratie avant tout
En effet, Jean-Serge Bokassa qui se destinait à l’origine à être missionnaire dans son pays s’est finalement tourné vers une carrière politique. Après avoir été député, il devient candidat aux élections présidentielles de 2016 où il obtient 7 % des suffrages, au cinquième rang sur trente candidats. Ayant choisi de soutenir l’actuel président, Faustin-Archange Touadéra, il devient ministre de l’intérieur chargé de la sécurité pendant un an puis ministre chargé du développement local et de la décentralisation avant de se retirer du gouvernement, désavouant sa politique. Jean-Serge Bokassa fonde le Front uni pour la défense de la Nation et se portera candidat pour les élections présidentielles de 2020. « Je me suis engagé dans un combat politique qui consiste à défendre le régime démocratique et les intérêts d’un peuple désavoué. », précise-t-il. Nous assistons actuellement à des dérives totalitaires avec une démocratie de façade, les lois n’étant pas respectées. Le peuple vit dans la tourmente, complètement tétanisé. Nous perdons nos acquis démocratiques et notre souveraineté car les Russes ont occupé beaucoup d’espaces en Centrafrique sans que l’Assemblée nationale ait été consultée. Nous avons soutenu l’actuel président de la République dans l’espoir qu’il prenne des actes courageux pour sortir de l’impasse, mais cela n’a pas été le cas, La venue des Russes en 2018 a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Avec mon parti, nous allons entreprendre une procédure de destitution de l’actuel président de la République qui a violé son serment, car nous estimons qu’il doit répondre, de façon légale, de ses actes qui sont des crimes de guerre et contre l’humanité, constituant un acte de haute trahison contraire à la Constitution. Je suis conscient que cette procédure n’aboutira pas mais nous restons dans la légalité et les valeurs républicaines, tout en conservons ses valeurs et ses principes en utilisant des moyens pacifiques. Pour l’histoire, il faut le faire. »

Idées reçues
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le nom de Bokassa n’a pas entravé la carrière politique de son fils, bien au contraire. « C’est grâce à mon patronyme que je suis devenu député, c’est plutôt un avantage, explique Jean-Serge Bokassa avant de démontrer que la situation de la Centrafrique s’est détériorée depuis le règne de son père : Il s’est livré à la justice de son pays et son procès donne l’idée de qu’on lui reprochait : sur quatorze chefs d’accusation, quatre ont été retenus. Même s’il a indéniablement commis des actes graves contre les droits de l’Homme, ce qui se passe de nos jours n’a aucune mesure avec l’époque de mon père. À l’époque de mon père, il n’y avait pas de mercenaires armés comme aujourd’hui. Actuellement, des villages sont rasés tous les jours. Sous le règne de mon père, la Centrafrique était parmi les premiers producteurs de coton et de café. Après lui, le développement du pays s’est arrêté. Aujourd’hui, le pays est complètement anéanti. Un semblant de vie existe dans la capitale mais le reste, c’est la désolation. »

Place aux jeunes générations
Jean-Serge Bokassa lance un appel aux jeunes générations africaines qui ont émigré : « Mon père caractérisait les chefs d’État africain de l’époque mais aujourd’hui ce modèle ne passe plus. Les jeunes générations qui sont allées étudier à l’étranger aspirent à un modèle démocratique. Le relèvement de l’Afrique est dans les mains de ces jeunes qui doivent revenir chez eux et les politiques doivent leur faire une place car nous avons besoin de ces compétences. »
F.M.