Si, au départ, ils étaient environ 150 (180 en 2020), on en trouve que six à l’arrivée de la sélection du Roblès 2021, 31ème du nom. Avec des titres et des lignes presque aussi noirs que l’œuvre du dernier lauréat, Joseph-Ponthus, trop tôt disparu, dès son titre proclamé et dont le souvenir hantera, sans nul doute, la proclamation des résultats le vendredi 18 juin. Point à la ligne et paix à son âme.
Le show continue et les six titres finalistes du futur prix Roblès, cru 2021, ont été dévoilés à la presse, à l’issue d’un point-presse masqué, mais sans plume! Et ce, après un tri aussi sélectif qu’impitoyable, commencé depuis septembre dernier, au rythme de quelque 30 livres (50 même pour certains lecteurs : une bonne vingtaine, du comité (23 rencontres-échanges), plus les permanents de la Bibliothèque Abbé-Grégoire, sous la conduite de Roxane Pineau, responsable de la médiation culturelle des bibliothèques d’Agglopolys). Une sélection «off» propose une bonne vingtaine de titres de pépites…
Comme si le confinement et la Covid étaient passés par là, il semble que le contenu, d’après les animateurs, est, cette année, sombre et pas très joyeux. Les titres eux-mêmes annoncent du «noir», avec des mots forts, lugubres, froids et tristes…, mais il y a du lourd (plus de 400 pages pour «Les abattus», en poids, mais aussi en qualité d’écriture. Avec des voyages à la clef…qui feront rêver, même si les circonstances seront, n’en doutons pas un instant, encore très moroses.
Programmée en ligne, le vendredi 19 mars dernier (bibliotheques.agglopolys.fr), la présentation officielle a précédé deux-rencontres-débats prévues, sauf dernières consignes sanitaires, les vendredi 23 avril et 11 juin, avant la cérémonie d’honneur, avec remise de prix, le vendredi 18 juin, en La Halle aux grains. Sur le papier, n’étant pas lecteur attitré pour la sélection, les six écrivains (deux femmes et quatre hommes) semblent aussi égaux que séduisants dans leurs contenus et leurs trames et le rôle des derniers sélectionneurs n’en sera que plus difficile. Ne reste qu’à souhaiter, à la ou au futur(e) lauréat(e), un peu plus de temps de vie que n’en a eu Joseph-Ponthus pour profiter de sa gloire et de son prix…Ce sera un pied de nez à la malchance qui l’a emporté si vite.
Jules Zérizer
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Et les nommés,
dans l’ordre alphabétique, sont…
«Nés de la nuit» (Plon) de Caroline Audibert. On se retrouve dans la peau et le «cerveau» d’un loup qui pense et philosophe sur ce qui l’entoure dans son environnement, la nature, les hommes, les autres animaux…Caroline a eu, sans nul doute, son enfance bercée par les récits de son père qui a (re)découvert un loup en France dans le Massif du Mercantour, dans les années 90. Journaliste, auteure, aussi, du livre «Des loups et des hommes», elle est, également, surnommée «La princesse du Mercantour». Tout un programme qu’elle ne manquera pas de faire partager aux autres le 18 juin (L’appel de la forêt?).
«Les aigles endormis» (Gallimard), de Daniel Danquigny planeront au-dessus de l’Albanie à l’époque de la chute du dicteur Enver Hocha. Un pays avec des gangs de la mafia locale, des trafics, des règlements de comptes est mis à nu dans ce roman signé par un psycho-criminologue de profession qui n’a pas hésité à mettre du noir dans ce récit qui fera découvrir ce pays méconnu de bon nombre, mais par ailleurs charmant, paraît-il.
«Les Cormorans» (Rivages) d’Édouard Jousselin, économiste montargois. Longtemps considéré comme une richesse, le guano, amas d’excréments d’oiseaux marins et de chauve-souris, servant d’engrais, après nidification, tend à se raréfier. Ce roman, qui commence par la fin, compte les aventures et mésaventures du capitaine Moustache, le seul à pouvoir naviguer dans le brouillard (!), un ex-révolutionnaire péruvien, au XIXème siècle…Avec un peu d’amours et beaucoup de révoltes dans un univers aussi glauque et sombre que le guano. Tout un programme.
«Ce qu’il faut de la nuit» (Manufacture des livres) de Laurent Petitmangin. C’est un hommage au père, grand militant communiste, par un fils qui continue à lui parler et communiqué avec lui. Nostalgie d’une époque pas si lointaine, d’une société au sein de laquelle le PCF occupait une grande place? Une façon comme une autre de faire revivre l’auteur de ses jours pour qu’il témoigne et constate que rien n’est plus comme avant. Comme ce que nous allons vivre après le confinement.
«Les abattus» (Rivages) de Noëlle Renaude. Ce second ouvrage de la sélection aux éditions Rivage annonce 400 pages! Du loud. On se retrouve dans les années 80 (voitures comprises), dans une ville moyenne régionale, type Romorantin-Lanthenay et/ou Vendôme, avec la vie, pas rose du tout, d’un homme type notaire, qui s’aperçoit que tout disjoncte autour de lui, qu’il accumule malchance et adversité et qui ne sait plus s’il est témoin ou acteur de cette catastrophe autour de lui. Il glisse sur les événements sans s’y inclure, mais les subit, sans abandonner, avec la même ténacité que son père garde-chasse. «On dirait du Chabrol» en livre a expliqué un lecteur «professionnel», au cours du point-presse.
Enfin «Le démon de la colline aux loups » (Le Tripode) de Dimitri Rouchon-Borie serait un véritable coup-de-cœur, avec un texte fort de la part d’un homme qui, du fond et des tréfonds de sa prison, revient sur son enfance violente. La langue est dure, malmenée, tourmentée comme sa vie qui ne serait pas romanesque. C’est un roman très contemporain qui dénonce les échecs d’une formation scolaire et/ou familiale et qui est écrit à la première personne, à la vitesse du loup qui court, presque à la Joseph-Ponthus : sans virgules (3 ou 4), mais avec des points et des blancs. Sacré Joseph. Tu n’as pas fini de hanter les coulisses de tous les prochains Roblès!
J.Z.