Sacré La Fontaine, lièvre facétieux et rainettes qui ne sont pas des pommes…


Au fil des ans, la dictée animée par Le Rotary Club Blois, Loire et Châteaux, prend de la rondeur, de la cuisse et annonce des crus de plus en plus savoureux à déguster après des vendanges littéraires de qualité. Surtout quand le conteur (et non pas compteur…) du jour se nomme Bertrand Renard (pas celui de la fable de La Fontaine…), grand passionné de littérature, du beau langage et de la phrase bien troussée, animateur de l’émission «Des chiffres et des lettres», officie devant une classe aussi attentive que disciplinée, sans pions qui font le gué.
Actuel président du club, Christophe Balavoine a salué à Blois samedi 17 mars les quelque 105 participants, dont un bon quart de jeunes venus en familles, se frotter aux pièges et dédales d’un texte sur «Le lièvre et les grenouilles», ou rainettes à ne pas prendre pour des pommes, nouvelle fable revisitée et fort bien saucée pour faire monter et épicer la mayonnaise, ce qui entraîna moult perles de sueur sur les fronts des candidats… Il n’y eut pas de zéro faute et le plus capé en a signalé 8 tandis que le reste de la troupe s’est perdu entre 30 et plus au compteur tant ce fut dur, piégeur, vicieux  et malin. Mais le principal était de participer pour aider le Rotary en sa campagne contre l’illettrisme, via le Centre de Ressources Information Accompagnement de Loir-et-Cher (CRIA41), qui avait délégué quelques-uns de ses membres pour participer, aussi, au concours.
Jules Zérizer
Contacts du CRIA 41 au 02 54 43 40 84.


Dictais-moua….

Une dictée était organisée samedi 17 mars sur le campus de la CCI à Blois. « Le lièvre et les grenouilles » de Jean de la Fontaine avait été choisi. Parmi les candidats, Jules Zérizer, 17 fautes au compteur. Et vous, combien ? Nous publions le texte dans nos colonnes pour vous confronter à l’exercice … Un, deux, trois, dictée !

Tests pour départager les éventuels ex aequo

1)Pour tous : le lapereau, la hase, la rabouillère.
2)À partir des jeunes adultes : des lapins angoras, des lapins chasseur, des becs-de-lièvre.
3)Pour les adultes : la gibelotte, la cuniculiculture, la myxomatose.
4)Question pour départager les irréductibles ex æquo (au plus approchant) :
Combien de fables La Fontaine a-t-il publiées ? Réponse : 240

Texte : Le lièvre et les grenouilles, d’après La Fontaine
Un lièvre, qui vivait non loin des rivages de la Méditerranée, méditait tout le jour, terré dans son abri côtier – car, dans une ténébreuse tanière, comment s’occuper autrement quand on n’y dort pas comme un loir ? Notre animal cependant n’a de la marmotte que son pelage brun-roux. Alors, dans son gîte (gite*), il cogite ; dans le tréfonds de son antre obscur, il se morfond, les pensées aussi cafardeuses que celles d’une blatte d’ici ou d’un cancrelat.
[Fin de la dictée pour 8-14]

Ses réflexions le tourmentent, le corrodent ; son anxiété perpétuelle le taraude, et, sans une carotte à grignoter pour calmer son angoisse, il se met à se ronger les sangs : « Que ne suis-je né impavide abeille détendue des mandibules, butinant dare-dare (daredare*) cytises épanouis et daphnés parfumés, l’essaim prêt à me soutenir en cas de menace ?
[Fin de la dictée pour les 15-18]

Las ! moi qui au grand jamais ne sais demeurer quiet ou coi, onc (onques, oncques) ne peux faire bonne chère. Ne suis-je pas constamment sur les dents au point que l’onychophagie me consume jusqu’au bout des ongles ? Qu’une simple branchette de châtaignier frémisse au-dessus de moi, et il faut que je fuie, détalant comme un lapin, convaincu qu’un goupil est tout près de me tomber sur le râble. Sans doute les vraies gens ordinaires souffrent-ils autant que moi de ce syndrome morbide, mais languir ainsi, sans même un petit granulé d’anxiolytique à se glisser sous la langue, ça ne vaut pas un pet de lapin. »
Soudain, le bouquin, qui n’était pas dur de la feuille, ouït un grondement dans le tunnel de son terrier, qui faisait caisse de résonance. Aussitôt la bête, tout affolée, déguerpit hors de ses pénates devenus subitement sinistres. Passant tout à côté d’un étang où croissaient de communs acores, le lagomorphe vit nombre de rainettes se musser en plongeant au fin fond de noirs abysses. « Vingt dieux, ces amphibiens se sont fait la malle à mon approche ! S’affoleraient-ils devant mézigue ?  Se sont-ils imaginé que je suis un redoutable va-t-en-guerre ? Ainsi donc, à couard, couard et demi ! »
Philippe Dessouliers : Twitter @les.mots.phil
Texte révisé par Paul Levart et Daniel Malot, grands champions de la dictée des Amériques 2009.
*Variante nouvelle orthographe.