Tourbières de La Guette : histoire d’eau et réhabilitation du fonctionnement hydrologique


Neuvy-sur-barangeon
Les tourbières de La Guette sur le territoire de la commune de Neuvy-sur-Barangeon près de Vierzon, sont devenues depuis 2014, un vaste champ d’observations, d’expérimentations et d’études à l’échelle nationale, labellisé par l’Institut National des Sciences de l’Univers du CNRS.
Le projet « Car Bio Div » (carbone et biodiversité), est en effet un programme d’études pluridisciplinaires financé par le CNRS, l’université d’Orléans, région Centre, le conseil départemental et le FEDER* dont l’objectif est de mesurer l’effet d’une remise en eau partielle de la tourbière sur sa bio diversité et sa capacité à stocker le carbone. Coordonné par le laboratoire de recherche Institut des Sciences de la Terre d’Orléans (ISTO), ce projet inédit en France repose sur une synergie entre différents partenaires : universitaires, associations naturalistes, bureaux d’études et entreprises de génie écologique.
Provoquer une remontée de la nappe d’eau
L’objectif de cette lourde opération a pour but de provoquer localement une remontée de la nappe d’eau et de limiter les pertes d’eau au niveau du fossé de drainage le long de la route Neuvy-Bourges. Un reméandrage artificiel entre chaque seuil (bentonite : argile) au niveau de l’exutoire aval redirige une partie de l’eau vers l’amont de la tourbière. Depuis 2014, les chercheurs de l’ISTO et plus précisément sa directrice adjointe Fatima Laggoun, interviennent sur le site de La Guette véritable réseau de biodiversité. Le Petit Berrichon était l’invité de l’ISTO et de son chargé de recherche Jérémy Jacob véritable puits de sciences qui, fort aimablement et avec beaucoup de pédagogie, nous a fait découvrir sa structure (voir en encadré) et dirigé vers ce site merveilleux des Tourbières de Neuvy. Accueil riche d’enseignements là aussi, par deux passionnées nature que sont : Sandrine Hutteau la responsable et son adjointe Amandine Demessence. Conduits sur le site par notre guide Amandine, nous avons une heure durant exploré cette cuvette imperméable qui reçoit l’eau de pluie et de ruissellement s’infiltrant dans la tourbière. Amandine nous « embarquait » dans une exploration  de cette tourbière en un « cyclone pédagogique » tant les infos étaient riches et passionnément argumentées. Quels sont donc les acteurs principaux de ce processus : les carex, les linaigrettes et surtout les sphaignes ; espèce « ingénieure » que nous détaillait plus précisément Sandrine Hutteau dans une explication historique et passionnante là aussi de ces tourbières. « Depuis longtemps, la commune de Neuvy avait pour objectif de développer l’offre touristique et particulièrement autour de l’eau ce qui explique cette création de la Maison de l’eau. L’intérêt de notre site et par conséquence, la venue de chercheurs universitaires, c’est qu’il est communal alors que la plupart sont du domaine privé. Les études actuelles  permettent de comprendre la déperdition de l’eau car en 2010 j’allais dans la tourbière en tongs… ». Aujourd’hui, grâce aux relevés des chercheurs, études et expérimentations, l’eau de la tourbière est  au ras du sol et retenue par ces fameuses sphaignes, mousses qui peuvent retenir jusqu’à 30 fois leur masse sèche en eau. Elles sont considérées comme une espèce « ingénieure » car elles sont capables de produire les conditions favorables à leur propre développement (acidité et humidité). En 2010, l’eau partait dans le fossé le long de la route dont le curage  fut remis en cause et un nouveau processus est désormais mis en œuvre dans le fossé pour freiner le chemin de l’eau et la réacheminer vers la tourbière, provoquant ainsi et c’est ce que les chercheurs exploitent : un retour de la biodiversité. À ce titre, huit seuils ont été créés et deux stations en amont et en aval avec douze placettes ont été installées afin de contrôler les effets des travaux.
tourbière
La protection des tourbières, un enjeu colossal
La protection des tourbières est un enjeu colossal car la matière végétale morte qui compose une tourbière, est un matériau, véritable éponge qui retient l’eau pendant les crues par exemple et qui la libère durant les périodes sèches. De plus, ces tourbières stockent le carbone contenu dans cette matière morte et contribuent à la régulation climatique. Elles filtrent l’eau, hébergent une faune et flore rares et menacées. Elles représentent également de véritables archives sur l’histoire de l’homme et des climats (piégeage et conservation des pollens). Parmi les oiseaux spécifiques qui les fréquent on y retrouve le Pipit Farlouse, et des plantes comme la linaigrette, les sphaignes (9 espèces) et Drosera (2 espèces). Un souci majeur pour préserver aussi ces tourbières est de veiller à ce que les bouleaux qui se trouvent sur le haut des tourbières n’envahissent pas le site. Site naturel, cette tourbière Neuvycéenne dite « topogène » est devenue lieu de découverte, d’instruction, d’information et de pédagogie que la communauté de communes des villages de la forêt, la maison de l’eau,  entretiennent avec beaucoup d’intérêt et à juste titre tant la valeur biologique, écologique, scientifique, archéologique, ethnologique et économique est importante sans oublier l’aspect paysager, récréatif et éducatif.
Communauté de communes
Maison de l’eau
Route de bourges – 18330 Neuvy sur Barangeon
Tel : 02 48 51 66 65
www.maison.eau.neuvy@wanadoo.fr
* CNRS : Centre National de Recherche Scientifique
* FEDER : Fonds Européen de Développement économique et Régional
 
ISTO : L’Institut des sciences de la terre d’Orléans fait partie, avec le laboratoire de physique et chimie de l’environnement et de l’espace (LPC2E), de la Station de radioastronomie de Nançay, des trois unités fondatrices de l’Observatoire des Sciences de l’Univers en région Centre (OSUC). C’est une unité mixte de recherche du CNRS, de l’université d’Orléans et du BRGM dans le domaine des géosciences situé sur le campus CNRS orléanais. Il regroupe un vaste champ disciplinaire dans le domaine de la géologie (pétrologie expérimentale, biogéochimie), des environnements continentaux, étude des ressources minérales et des bassins sédimentaires sur la base d’approches complémentaires (terrain, analyse, expérimentation) répartis sur cinq grands programmes : Biogéostèmes continentaux (sols, l’eau, les tourbières et les sédiments) – Transferts réactifs dans les hydrosystèmes multiphasiques  (mesures hydriques, chimiques, thermiques ou même mécaniques) – La géodynamique : (lithologie, la pression, la température, le taux de déformation, chimie des fluides dans la lithosphère) – Fluides : transports et dépôt des métaux – Magmas : agents essentiels de la dynamique de la terre.
L’ISTO jouit d’une reconnaissance nationale dans le cadre des investissements d’avenir. Il coordonne les activités scientifiques du service national d’observation tourbières porté par l’OSUC et labellisé par l’INSU. L’ISTO c’est : 70 chercheurs (enseignants chercheurs), 46 doctorants et post-doctorants, 21 ingénieurs techniciens et administratifs.
La formation par la recherche : Licence et Master en Sciences de la Terre et de l’Environnement et Doctorat. Collaborations internationales : Brésil, Chine, USA, Canada, Chili, Equateur, Japon, Européennes et Nationales.
ISTO, Campus Géosciences, 1A rue de La Férolerie, 45071 Orléans cedex 2. Tel : 02 38 49 25 34. http://www.isto.cnrs-orleans.fr