214 – Le billet d’humeur par Émilie Rencien


Ce n’est pas le nombre de centimètres qu’il faut perdre avant l’épreuve de vérité du maillot de bain sur la plage des vacances, ni le nombre d’achats effectués le premier jour des soldes estivales. Ce n’est pas non plus le nombre de gardes du corps qui encerclaient samedi 30 juin le petit village solognot de Chaumont-sur-Tharonne pour cause de mariage en grandes pompes de Charlotte Bouygues, fille de Martin, en grande compagnie aussi d’invités, tels le couple Bruni-Sarkozy, empêchant parfois les simples citoyens de circuler librement vers d’autres fiestas. Un nouveau livre de George Orwell, quoique ; sa “Ferme des animaux” aurait pu être de ces combats-là. Parce que la lettrée dystopie rejoint parfois une caligineuse réalité. 214 donc, pour L214. À la simple prononciation de cette lettre et ce chiffre, nous voyons certains avoir des boutons, ériger la bannière “écolos, têtes de veau” et autres qualificatifs “affectifs” de bien-pensants. Mais il est temps d’oser regarder en face cette cruauté qu’on ne saurait voir. La nouvelle vidéo pas chic mais choc de l’association précitée concerne les vaches à hublots. Pas une nouveauté (la technique serait mise en pratique depuis plusieurs décennies) et un pseudo mal pour un bien ? Plus précisément, «une expérimentation « choquante » mais « utile », selon Brune Poirson. La secrétaire d’Etat à la Transition écologique adjoint. « Ce sont des pratiques scientifiques et qui ne font pas souffrir l’animal ». Les vaches le « vivraient bien », en somme. Hum… Et pour être volontairement malséant, si on essayait sur des adultes en fin de vie, pire sur des enfants, le point de vue serait-t-il toujours identiquement argué ? Sacré poison, assurément, du business à tout prix caché derrière la forêt de poudre aux yeux, opium du peuple. Tout cela sur fond de canicule affolant les foules et devenant LE sujet à la Une, empêchant quasiment durant une harassante semaine la planète infos de tourner. Chaleur extrême qui aura permis de remettre le sujet animal sur la table, toutefois, avec notamment la question de l’interdiction du transport de nos amis les bêtes dans l’enfer de la fournaise, avant celui de l’abattoir.

Heureusement, dans ce capharnaüm cacophonant d’inquiétudes surlignées de flots bleus fluorescents en mer du Nord, saupoudrées de poignées de poissons morts dans les Bouches-du-Rhône, le député LR de l’Indre, Nicolas Forissier et Nadia Essayan, députée Modem du Cher, auront en Centre-Val de Loire, cosigné une proposition de loi brûlante visant à durcir les sanctions pour lutter contre l’abandon d’animaux. Oui, car qui dit été, dit lâcheté. Qui écrit la chanson de l’été sur une plage abandonnée, coquillages et crustacés, n’écrit pas uniquement des rimes de corps lestés, de tissus pour frusquer, sur le sable animé, à Cannes, en Corse ou à St-Tropez. Qui crie été, crie aussi bestialité. « Nous sommes les champions… » Rien à voir ici avec les sportives du ballon rond français. Rien de quoi se réjouir : en France, toutes les heures, plus de 11 animaux domestiques sont abandonnés. Soit environ 100 000 abandons annuellement, comme un vulgaire paquet de Kleenex jeté par la fenêtre ouverte en roulant, impunément, les cheveux au vent. Dont 60 000 en été, d’après les données communiquées par l’association 30 Millions d’Amis. Ce qui classe la France en haut du panier européen. Triste palmarès. Pour une fois que nous brillons, le feu du projecteur n’est pas braqué dans le bon sens. Loin s’en faut. Pourtant, des sanctions empreintes de deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende en cas d’abandon d’animal, de sévices graves et d’actes de cruauté, existent, notamment dans l’article 521-1 du Code pénal, depuis 1999. Alors, quoi ? De fait, faut-il jeter une bouteille à la mer ? Je ne vous le conseille pas non plus, ça pollue et c’est de surcroît mal perçu… En 2005 déjà, Nicolas Forissier, alors secrétaire d’Etat, interpellait sur ce sujet. Il aura défendu le statut juridique animal afin de passer des termes «chose» à «être sensible» dans le Code civil. « Une partie a avancé comme la place de l’animal dans le droit, » explicite l’élu, 14 ans plus tard. Mais en revanche, pour le reste, où en est-on ? Surveillance et contrôle des lieux de vente? Responsabilisation des maîtres ? Lutte contre le fléau mondial du trafic d’animaux ? » Derrières les paroles, comme en amour, ce sont les actes qui importent et comptent le plus. Avant les départs de l’été et ses joies hâlées, 214 fois, vous copierez ces lignes : «plus je connais les hommes, plus j’aime mon chien et mon chat … »