Billet d’humeur de Fabrice Simoes


L’avenir est déjà là

La femme est l’avenir de l’homme, selon Jean Ferrat qui trouvait que le vers « l’avenir de l’homme est la femme » écrit par Louis Aragon ne collait pas bien dans sa chanson éponyme. L’un et l’autre avaient couché sur le papier cette formule à une époque où on ne parlait pas de discrimination positive et pas plus d’égalité des sexes. Cette dernière notion égalitaire nécessitera bien un jour une légifération. Il faudra se pencher là-dessus, pas trop tout de même. Comme pour la définition du sexe des anges. La nature est ainsi faite, qu’on le veuille ou non, y en a des plus longs, y en a des plus courts, y en a des plus gros et y en a des plus petits, pour les hommes. Quant aux femmes, je laisse aux spécialistes de la gente féminine toute latitude pour nous transmettre toutes définitions physiques qui ne tomberaient pas sous le coup possible d’un texte de loi et n’entraîneraient pas de poursuites judiciaires ! C’est que sur ce coup-là, votre serviteur ne souhaite pas endosser la responsabilité de remarque qui pourrait blesser, interloquer, voir suggérer d’éventuel problème. La déresponsabilisation s’applique aussi aux billettistes, l’irresponsabilité non !
Une certitude cependant, la femme n’a pas attendu l’avenir pour être au niveau de l’homme dans la plupart des domaines. Chaque jour apporte son lot d’exemples où la stupidité féminine est au moins à l’égale de celle de ses homologues masculins. « Je ne comprends pas pourquoi les cheminots font la grève… La suppression du statut ne les concerne pas. En plus ils ont une prime de charbon… » dit l’une. « En Solidarité ? » interroge une seconde. « Ça veut dire quoi ces gens qui nous prennent en otage » demande à la cantonade une troisième dont le dernier transport remonte à l’année 2012, pour ce qui concerne le ferroviaire. Si l’on ne précise pas que ce sont des femmes qui discutent, on pourrait croire que ce dialogue est celui de quidams accoudés au comptoir du bistrot du coin, non ? Comme à des mecs on pourrait peut-être tenter d’expliquer que les cheminots ne font pas la grève par plaisir, que la prime de charbon est supprimée depuis les années 70 (de l’autre siècle), que la solidarité c’est ce qui leur permet d’aller chez leurs kinés à moindre coût et enfin que l’on ne leur souhaite pas d’être prises en otage réellement un jour. Ce serait peine perdue. Comme à des mecs, pas plus, pas moins. L’égalité est déjà là, on vous le dit.
Alors, où peuvent bien se nicher les points de clivage entre hommes et femmes dans cette société du nivellement ? Peut-être que la couleur des maillots de Finishers remis à l’arrivée du dernier marathon de Paris peut entrer dans ce cercle négatif. Ils étaient bleu pour les hommes et saumon pour les femmes. De quoi provoquer l’ire de féministes obnubilées par l’égalitarisme ou simplement réfractaire à la couleur orangée. Déjà porter en public un tee-shirt de course à pied avec ce « Finisher » qui barre le torse écrit en gros, se suffit en lui-même. Comme pour un paon à la parade ce n’est pas la couleur qui transforme cet espèce de fierté narcissique en intelligence rare. Spiridon Louis, le vainqueur du premier marathon olympique, n’a jamais porté de tel tee-shirt et Kathrine Switzer, la première femme à courir un marathon -une vraie féministe qui a couru le marathon de Boston, en 1967, sous la protection de son entraîneur et de son compagnon- non plus. Pourtant, l’un et l’autre sont égaux… L’un pour avoir créé l’histoire de cette épreuve mythique. La seconde plus encore pour avoir lancé une véritable révolution sociale. Et, sportivement, parcourir la distance d’un marathon en plus de 6 heures, pour un homme comme pour une femme, on peut se demander si c’est encore de la course à pied. C’est une question que le journal l’Equipe se posait déjà à la fin des années 80.
Pour Emmanuel, l’égalité c’est son credo. Notre président à nous qui illumine notre vie, gloire à toi, astre des cieux, grand seigneur dont l’immortalité est assurée, toi, la supra-connaissance et la supra-intelligence de notre vie, et qui place tous ses ministres au même niveau. Que ce soit pour Elisabeth Borne, la ministre des transports, ou pour Nicolas Hulot, le ministre de l’écologie, c’est du kif-kif. L’une et l’un doivent se débrouiller tout seuls. Fusibles ils sont pour la SNCF et Notre-Dame-des-Landes. Il décide en haut. Il et elle doivent assumer en bas. L’égalité devant l’adversité, y a que ça de vrai. Manu doit avancer. Il regardera plus tard les pertes, tous les laissé(e)s pour compte sur le bord du chemin. Une certitude, cela se fera dans la globalité, non pas en fonction de l’appareil reproducteur des morts pour la France à Manu.
Les femmes, et l’avenir, sont au rendez-vous d’aujourd’hui. Alors, « L’avenir de l’homme est la femme », c’est vraiment dépassé depuis belle lurette. Pour sûr. Par contre, franchement Louis, tu crois vraiment qu’Elsa t’en aurait fait une pendule pour un tee-shirt saumon ?
Fabrice Simoes