Chacun(e) crée son nid


Vol au-dessus d’un nid de coucou. Et quel nid, celui-ci ! Dans un nouveau battement d’ailes, entre deux roulades dans la farine et selfies agricoles, voici venu le temps pour la gent politisée de penser à creuser son nid, de voix d’ici le scrutin européen du 9 juin. Ainsi, tout est, aujourd’hui plus qu’hier, prétexte à communication. Marion Maréchal (Reconquête!), par exemple, aime venir en Sologne ces derniers temps : pour la galette des rois, les tracteurs en convoi. Pour une balade au château de la Ferté Saint-Aubin, en famille… Même, elle se sera essayée à un moment piscicole au bord d’un étang, à Saint-Viâtre, le 8 février. Du fait, selon sa direction de cabinet “d’un réseau aléatoire”, notre presse locale aura manqué le rendez-vous, signalé trop tard. Ah la vie en ruralité, mais la caméra tournait : la séquence a été postée sur les réseaux sociaux de l’ex-député solognot Guillaume Peltier. Une vidéo souvenir sur laquelle la candidate Maréchal, le visage empreint de boue projetée dans l’action, saisit des poissons en s’en débarrassant très vite dans un seau ou dans l’eau. C’est de la pêche certes. Mais pas terrible, question bienveillance animale. Allez, nous devons être trop sensibles, ou justement, pas assez à certains messages.
En tout cas, que ne faut-il pas faire pour espérer décrocher un score aux élections ! Jusqu’à aller ruiner ses chaussures de ville dans la vase et la fange des chemins de campagne, sans télécommunications. Jusqu’à avancer comme idée peltiérienne que le fait d’ “avoir des enfants, c’est la garantie de sérieux”.
Pour suivre la ligne, le député européen, le Nantais Christophe Clergeau (PS), en visite à Blois le 15 février, qui défendait sa paroisse de gauche(s), portée par Place publique et le charismatique Raphaël Glucksmann, remarquait aux journalistes, prévenus en temps et en heure ici, que “le RN ne fait rien au Parlement européen”, visant le bien peigné Jordan Bardella. Pour en rire, et mieux vaut en rire, peut-être que certains sont trop occupés à procréer. Comme c’est ce qui pourrait permettre une bonne impression, bien qu’extrême. Élective ? Plus la ficelle malheureusement se présente épaisse, plus parfois cela peut mordre.
Même la Saint-Valentin, fête qui a la valeur qu’on lui porte (très commerciale, et stigmatisant les célibataires), aura permis à la propagande politique de déployer ses pétales. Ainsi, tandis qu’un hommage national était rendu place Vendôme à l’avocat Robert Badinter, père de l’abolition de la peine de mort en France, LFI, indésirable lors de la cérémonie, a préféré s’occuper d’autres fleurs : une députée, également européenne, la Varoise et Insoumise Manon Aubry, vidéo à l’appui aussi, était en effet à Cellettes, en Loir-et-Cher, le 14 février 2024, sur l’exploitation « Clément Fleurs ». L’objectif était d’évoquer les impacts concrets des accords de libre-échange (comme avec le Kenya, en cours) signés par l’Union européenne et la concurrence déloyale de l’importation de fleurs. Quant à Marine Tondelier, secrétaire nationale EELV, elle avait choisi, le 20 février et le Cher, pour parler plateformes logistiques, écopôle alimentaire, agriculture bio et autonomie énergétique. Et d’aucuns encore, selon le dernier néologisme en vogue, “macroneront” bien, là ou ailleurs, d’ici l’urne de juin !
Vous l’aurez compris, dans l’Hexagone, nous n’avons pas de coup de pouce d’une Taylor Swift influente. Seulement, une Chantal Goya qui apprécie la diplomatie des pandas. Et l’adage des hirondelles, qui amènent le printemps, s’avère de moins en moins vrai. Alors, le vol de tous ces oiseaux politiques débute comme il peut, cahin-caha, avec de nouveaux biais de communication dignes d’une pie bavarde, et chacun(e) crée son nid. Enfin … Elles et ils tentent.

Émilie Rencien