Dans le panneau


​​Tous les quinze jours, nous essayons de ne pas palabrer sur des sujets dont toutes les chaînes d’info en continu dissertent toute la sainte journée. Nous tentons à chaque fois de surcroît, de déployer sur ce papier des thèmes qui peuvent un brin adoucir une actualité internationale composée de récurrences mortifères, pas du tout pacifiée (inutile de détailler ici les récentes exactions terroristes, de toutes les manières indicibles, perpétrées sur la terre d’Israël, s’ajoutant au conflit russo-ukrainien toujours en cours depuis 2022; les JT se plaignant à l’envi des punaises de lit, c’était mimi finalement…). Le tout dans un quotidien national par ailleurs pesant, teinté de gris plus que de couleur pêch(u)e, bien que nous soyons dans un mois d’octobre « Rose», du nom de la campagne annuelle de communication destinée à sensibiliser les femmes au dépistage du cancer du sein. Alors, histoire de se créer une béquille morale, et une autre bulle que tous ces problèmes (climatiques, économiques, de tensions diverses, et aussi de journaux qui mettent la clé sous la porte, etc.) à régler qui s’accumulent, pourquoi ne pas plutôt accepter de tomber dans le panneau ? Si cette expression est souvent usitée de manière péjorative, ce panneau-là est toutefois d’une teneur bienveillante. Puisque, si, il existe encore dans notre drôle de monde et d’époque, de bonnes nouvelles et jolies actions ! N’avez-vous pas remarqué, au volant, en roulant, des panneaux de signalisation d’un nouveau genre, faire leur apparition dans certains villages ? Dans une commune du Loir-et-Cher, près de Contres, à Chémery, face au château, par exemple, un triangle routier, enfermant la silhouette noire d’une mère canard avec ses canetons, a cet été été implanté en face de la boulangerie, à un endroit où en effet, de temps en temps, quelques palmipèdes fréquentent cette zone du centre-bourg et prennent le soin de franchir la rue principale, qui voit passer beaucoup d’autos et surtout de poids-lourds, en empruntant le passage piétons ! Aussi, l’association de Stéphane Lamart, impliquée pour la défense des droits des animaux, informe en parallèle du fait que la ville de Fresnes (94) ; municipalité dans laquelle il officie au passage comme conseiller municipal, mais ce n’est pas là l’information essentielle), “met en place des panneaux pour alerter sur la traversée de hérissons (…) pour préserver la faune sauvage qui vit avec nous en milieu urbain. Il en est de même pour les renards qui sont malheureusement considérés comme nuisibles, mais cela tient à cœur à la ville de Fresnes de préserver leur vie, comme celle des hérissons.” Cette commune projette en sus des indications à venir pour prévenir ce trajet des félins. Il se trouve justement qu’un tout premier cas a ouvert cette voie au mois d’août, trustant les colonnes de la presse quotidienne régionale. Nos confrères du Parisien titraient à cette période, avant le journal Le Bien Public : “« Ralentir, chat en balade » : les nouveaux panneaux de signalisation de Mennecy feront-ils des émules ?”. Quelques mois plus tard, la réponse semble positive, puisque cette initiative dans l’Essonne en août a donc donné des idées dans le Val -de-Marne en octobre ! Et ailleurs, en France. L’histoire ne raconte pas l’efficacité de ce nouveau système de sensibilisation des conducteurs qui marque sans doute davantage le regard qu’un rond rouge encerclant une limitation de vitesse. C’est en tout cas rigolo, ça ne mange pas de pain, et puis cela change des panonceaux d’avertissement avec des cerfs ou des sangliers en Sologne, ou des vaches sur les plages de Corse. Une manière ludique, pour des citoyens et des municipalités excédés de devoir ramasser des dizaines d’animaux écrasés sur leurs routes et chemins, de partager la nature et tenter de cohabiter en bonne intelligence. Mais l’idée n’est pas si neuve, même si chacun l’aura oublié : Jean de la Fontaine n’a-t-il pas écrit ? :  » Je me sers d’animaux pour instruire les hommes ”… Eh aussi, oui, nous donnons donc sans hésiter dans ce panneau qui porte attention à autrui, parce qu’il existe encore, en cherchant bien, un peu de douceur dans ce monde de fous et de brutes !

Émilie Rencien