Gil Avérous : «La prohibition n’a eu aucun effet sur le développement de la consommation de cannabis»


Avec ses collègues Les Républicains (LR) de Reims et de Charleville-Mézières, le maire de Châteauroux prend position pour la légalisation du cannabis récréatif, pour lutter contre la délinquance.
Plus que légaliser, c’est nationaliser la production du cannabis que prône Gil Avérous. «Il faut bien admettre que depuis trente ans la consommation de cannabis ne fait qu’augmenter et que la prohibition n’a aucun effet. On mobilise les forces de police avec une efficacité nulle. On n’y arrivera jamais.»
Pragmatique, le maire estime qu’il faut contrôler la production. «La Creuse ne se pose pas de question en se lançant dans le production du cannabis médical. Mais c’est la même plante qui produit le cannabis récréatif. En produisant un cannabis français et en contrôlant sa commercialisation on casse le marché des cartels qui font rentrer la drogue.»
Qu’il vienne de France ou de l’étranger ce cannabis aura le même effet nocif sur le cerveau de nos lycéens. «Dans les lieux dédiés, la vente aux mineurs restera interdite. En revanche les majeurs auront la possibilité d’acheter leurs produits sans alimenter les trafics. Il faut absolument casser cette chaîne de l’argent facile qui est un spectacle détestable pour les jeunes. L’interdit, ça stimule. La légalisation permettra de supprimer les mauvais exemples.»
Lorsqu’on met en parallèle cette prise de position et le niveau de la délinquance à Châteauroux, Gil Avérous reconnait que la préfecture de l’Indre ne vit pas la situation de certaines banlieues des grandes agglomération. « Nous sommes plutôt confrontés à la délinquance de fin de semaine, liée aux sorties de bars et à l’abus d’alcool. Cependant nous constatons une montée de la violence. Une violence entre trafiquants où l’on sort désormais les armes pour tenter de coloniser des territoires. Depuis deux ans, ça monte progressivement avec un changement de peuplement venu d’Outre-Mer, mais aussi de délinquants venant de l’extérieur. Récemment un duo de Marseillais a tenté de s’implanter à Saint-Jacques. Ça s’est terminé par des coups de feu et ils ont fini en prison.»

70% des voix, ça permet d’être audacieux
Quand on est élu avec 70% des voix, ça donne un peu de latitude pour prendre des initiatives audacieuses. Le maire le reconnaît. «Ça donne une légitimité qui permet d’expérimenter des choses. C’est vrai pour la dévolution de la moitié de la chaussée des boulevards extérieurs aux cycliste, comme du cannabis. Si j’avais été élu ric-rac j’aurais été un peu plus timide.»
De là à penser que le projet Green Challenge 36 qui prévoit la récupération de la chaleur du Data pour chauffer des serres où l’on ferait pousser des plants de cannabis, la question fait sourire Gil Avérous. «Je ne pense pas que le porteur de projet, tout Hollandais qu’il soit, verrait cela d’un bon oeil. Mais cette culture peut tenter certains de nos agriculteurs et si cela leur apporte un revenu complémentaire…» Reste à savoir par ailleurs si le projet Green Challenge 36 verra quelque fois le jour.
Gil Avérous a caressé son électorat à rebrousse poil, mais aussi ses collègues LR. « Quatre-vingts élus ont signé une tribune contre la légalisation, c’est exact, mais pas un parlementaire LR ne s’est adressé à moi pour me dire que je faisais fausse route. J’attends d’ailleurs avec impatience le rapport de la mission d’information commune sur la réglementation et l’impact des différents usages du cannabis. Elle compte un quart de députés LR dont le président Robin Reda. Je ne suis pas sûr que leurs conclusions soient différentes des miennes.»
L’expérimentation dans l’Indre de la légalisation du cannabis sera un sujet de choix pour Gil Avérous lorsqu’il recevra, prochainement, Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur.

Pierre Belsoeur