Histoires de berrichons : des personnages hauts en couleur


Autrefois, à la campagne, chaque village avait des personnages authentiques, hauts en couleur qui se faisaient une réputation dans toute la contrée de par leurs exploits. Longtemps après leur mort, la tradition orale transmettait toujours leurs aventures et ils devenaient légende. Les plus âgés en parlent encore. Parfois c’était des bons mots, des boutades qui traversaient le temps et on en riait.

Dans les couples, il existait souvent une sorte de rivalité, l’un établissant une petite de dictature à l’égard de l’autre. Ainsi on m’a conté l’histoire d’un ivrogne qui disait en parlant de sa femme « Elle a peur de crever et moi j’ai peur qu’elle ne crève pas ». Un autre brave homme que la femme faisait filer doux disait en riant « : « On s’est bien marié le même jour, mais il y en a un qui est mieux marié que l’autre. ». Quant à cet autre, philosophe, il proclamait : « Ma vie est un long désert et ma femme, le chameau qui m’aide à le traverser. »

Les divorces n’existaient pratiquement pas autrefois à la campagne. Quand on se mariait, c’était pour la vie, mais il ne faut pas croire que la fidélité était de mise. Les liaisons étaient nombreuses et alimentaient les ragots. Une femme volage avait reçu un jour un de ses amants, celui-ci avait posé ses sabots sur le pas de la porte. Quelqu’un les lui cacha et lorsqu’il ressortit de chez sa belle, il dut rentrer chez lui pieds nus.

D’autres liaisons semblaient acceptées du mari cocu. On cite le cas de cette femme qui recevait régulièrement son amant qui n’était autre que le curé de la paroisse. Quand celui-ci arrivait, le mari partait au jardin.

Dans de rares cas, il y avait séparation. Un homme, ulcéré des infidélités de sa femme, partit en prenant soin d’emporter l’argent du ménage, le cheval attelé à la charrette et même le cochon bon à tuer. Ce qui faisait dire à l’épouse abandonnée : « Il a tout emporté, même le cochon et c’est moi qui ait payé le son pour l’engraisser. »

Un homme resté célibataire épousa sur le tard une femme assez laide. Les voisins riaient en disant : « Elle n’est pas belle, belle, mais peut-être jamais malade ! »

On raconte aussi l’histoire de deux frères demeurés célibataires qui vivaient ensemble. Lorsque le premier mourut, il fut enterré dans la fosse commune. Quelques années plus tard, le survivant fit faire un caveau dans lequel il fit transférer son frère. Il retrouva ainsi la montre que son frère défunt avait emmenée avec lui dans son cercueil. Surprise : elle marchait toujours. Il la récupéra et l’utilisa jusqu’à sa mort. L’histoire ne dit pas si elle fut mise dans son cercueil.