“La généralisation des grillages donne une image détestable de la chasse”


Après le confinement puis le déconfinement, l’engrillagement en Sologne, un combat qui doit devenir viral… Questions, réponses avec Jean-François Bernardin, président de l’ACASCE, Association des Chasseurs et des Amis de la Sologne contre son Engrillagement.
On a pu voir dans la presse quotidienne ces temps derniers quelques grands engrillageurs se targuer du droit de propriété pour justifier leur comportement. Qu’en dites-vous ?
“Oui, bien sûr, nous avons lu ça et nous en sommes surpris. Je tiens à préciser d’abord qu’entre les membres de notre association et ceux du Comité Central Agricole de la Sologne avec qui nous travaillons la main dans la main pour stopper ce processus qui défigure notre région et risque de ruiner à terme ses deux activités essentielles que sont le tourisme et la chasse, nous devons être un petit millier de propriétaires, en général chasseurs. Et bien entendu en tant que tels, très attachés au droit de propriété, notamment pour nos territoires de chasse. Mais penser que le droit de propriété ne connaît aucune limite est une contre vérité.”

Que voulez-vous dire par là ?
“Que simplement la loi ou les réglementations encadrent et limitent ce droit dès lors que l’intérêt général le justifie. Vous savez bien que dans des cas extrêmes, l’intérêt public peut autoriser l’expropriation, comme cela a été le cas lors de la construction de l’autoroute. De façon beaucoup plus banale, les réglementations d’urbanisme peuvent définir lorsqu’il y a un motif légitime, les constructions possibles et parfois la nature des matériaux utilisés. C’est ainsi que le Conseil régional, en application du Code de l’environnement qui exige la libre circulation de la faune sauvage, a indiqué que les clôtures ne devaient pas dépasser 1,20 m et laisser un espace au sol permettant entre autres aux sangliers de se faufiler. C’est ainsi également qu’on ne peut pas, sous prétexte qu’on est à son domicile faire n’importe quoi et qu’un délit ou un crime commis chez soi reste un délit ou un crime. Pour en revenir à notre sujet, se pose ainsi la question : la chasse dans un espace clôturé est-elle encore légitime et un animal enfermé est-il encore chassable ? Notre opinion, c’est que le gibier étant par définition « res nullius » (en français « n’appartenant à personne »), l’abattage des animaux engrillagés, devenus de ce fait « res propria » (bien propre) devrait être interdit comme l’est de tuer son chien ou les animaux du zoo de Vincennes ou de Beauval, et nos parlementaires seraient bien inspirés de le préciser dans un texte prochain.”

Les mêmes personnes ont indiqué aussi que ce sont eux qui font vivre la Sologne. Votre avis ?
“Je ne sais pas trop s’il faut en rire ou en pleurer. La généralisation des grillages défigure notre région, nuit au tourisme et donne une image détestable de la chasse. Elle profite à l’économie comme la drogue aux toxicomanes, un peu de bien à court terme et la mort à long terme. Plus sérieusement, ce sont les dizaines de milliers de chasseurs, propriétaires ou non, et touristes qui font vivre la Sologne. Si ces quelques personnes dont nous parlons veulent contribuer avec nous à son économie, nul n’est besoin de saccager ses paysages.”