Le mobilier berrichon


Interieur-paysanLe mobilier berrichon se présente d’une manière assez homogène sur l’ensemble du Berry. Il apparaît plus soigné, plus élégant dans le bas Berry. Dans le haut Berry, on sent au-delà de Vierzon et de la Sauldre, l’influence des caractères solognots. La position centrale de la province génère une réceptivité certaine aux apports extérieurs.
Le mobilier berrichon révèle une société rurale imprégnée d’humilité, ouverte aux idées, mais tenant à préserver son identité et le parfum du terroir.
Au XVIIe, la situation du Berry rural peu florissante est véritablement un frein au développement du mobilier paysan, les intérieurs campagnards restent très sommairement meublés jusqu’à la fin du siècle. Ce n’est qu’après 1750, que l’on voit apparaître dans les foyers une aisance permettant l’essor de la création mobilière, accompagnée de caractères spécifiquement régionaux. Les artisans de villages fabriqueront des meubles dans l’esprit du XVIIIe jusqu’au XIXe, mariant les styles Louis XV et Louis XVI. Sobres, mais non sans élégance, les meubles berrichons, plus clairs en bas Berry, sont fabriqués généralement avec le chêne provenant des forêts alentour, le fruitier ou le noyer dont Sully encourage la culture. (on comprend le penchant des Berrichons pour l’huile de noix qu’ils conservent dans des bouteillons de grès typiques (les toulons), fréquents dans les demeures. Les artisans du meuble, menuisiers, mais aussi charrons et maîtres-huchiers, associent des bois différents sur une même pièce. Les côtés et le fond sont généralement en chêne pour résister à l’humidité, les façades taillées généralement dans du noyer ou du merisier. Pour le style, les artisans s’inspirent des réalisations limousines et ligériennes voisines, dont ils sélectionnent et mêlent les caractéristiques en y apportant des touches originales. Ils créent ainsi un mobilier homogène et caractéristique, qui reste, malgré tout, peu inventif, faiblement typé.
Rassemblés dans la chambre à feu (chambre commune ou maison), ils sont, avant tout, utilitaires, solides et massifs. L’ornementation reste secondaire, elle fait appel à des éléments figuratifs : le cœur ou l’oiseau (toujours par paires sur les meubles de mariage), la corbeille (symbole, aussi, d’union) et la soupière. On rencontre également des éléments végétaux (guirlandes incurvées de laurier, glands, pommes de pin, fleurs diverses, et des éléments géométriques dérivés du cercle (marguerites, rosaces, étoiles, éventails.) Les garnitures métalliques, à motifs largement ajourés, sont l’œuvre de ferronniers talentueux et sont souvent remarquables.
Le dernier point notable réside dans le goût des Berrichons pour le Louis-Philippe resté longtemps en faveur.
Pour terminer cette entrée en matière, précédant la description des principaux meubles des intérieurs paysans berrichons, qui fera l’objet d’une prochaine parution, saluons la dextérité et le savoir-faire des artisans de notre province qui ont laissé des pièces travaillées, qui font aujourd’hui encore le bonheur des amateurs de beaux meubles rustiques, aux effets de moirures et au délicieux parfum de terroir, traces avérées d’un patrimoine à sauvegarder, témoignage de nos racines.

D.-J. MATHO