Jeux de maux estivaux


Avant nos congés d’été, quoi de beau dans notre valise et cahier de vacances ? Et pourquoi pas des mots … croisés ? Cette année 2023 a pour beaucoup semblé longue, chargée de nouvelles guère catholiques, au rythme de casseroles et autres morbidités. Même les soldes en ce moment en cours ne parviennent plus vraiment à attirer le chaland et à occuper les colonnes de la presse accaparée par des histoires parlementaires, entre sandales allurées de la députée Raquel Garrido (LFI) ou encore pastiche musical d’Isabelle Boulay par un autre député, Ugo Bernalicis (LFI). «La croisière s’amuse » ou presque ! Inutile de glisser un mot sur la santé de Brigitte Bardot qui s’étiole et de la disparition de la britannique Jane Birkin. Cette année 2023, qui n’est pas encore terminée, fut éprouvante, et force est de constater dans ce sombre brouhaha, en parlant de cette dernière native de Londres, que certains y perdent leur latin. Au sens littéral. Il est de notoriété publique que le langage sms n’aide pas, notamment les plus jeunes, à maîtriser l’orthographe français; les écrans et les réseaux sociaux non plus. Pire, la langue de Molière s’effacerait de plus en plus au profit du phrasé de Shakespeare. Des maux dans l’ère du temps qui feront se retourner Jean-Jacques Rousseau et Émile Zola dans leurs tombes, mais qui n’offusqueront pas forcément dans notre XXIe siècle. Un fidèle lecteur, un oncle plus précisément nous faisait remarquer, à juste raison, pourquoi il était si compliqué d’écrire tous les mots en français. Au lieu par exemple de céder aux sirènes faciles de l’expression “body summer”. Ce serait un tout petit peu moins glamour déclamé « in french » sur le papier; quoique, rédiger à la place, «rendre son corps sexy pour l’été », cela passe finalement très bien également. Il est inévitablement plus tendance pour briller en société, de causer « team », « business plan », « deeptech », « replay », « crowfunding » (s’il vous plaît, traduisez en guise de devoirs sur la plage !), etc. Les rédactions en presse écrite elles aussi préfèrent, sans n’y prêter plus d’attention, usiter « deadline » plutôt que « dernier délai de rendu de la copie». D’ailleurs, qui ne s’est jamais adonné à cet exercice de glisser des termes en anglais pour sembler cool et populaire, lorsqu’il était collégien après avoir écouté la chanson gimmick d’un groupe à la mode ? Mais gare, c’est à double tranchant, car utiliser certains emprunts anglo-saxons peut parfois vite paraître très ringard. Dire « Tour Vaille-bré-cheun » pour « le Tour Vibration » n’est pas toujours très « hype» ni branché, surtout lorsqu’on ne loge pas à L.A. ! Ces anglicismes paraissent en effet envahissants, à l’instar de la jussie sur les étangs solognots, et la difficulté réside bien souvent dans la parade à trouver pour une traduction percutante. Mais le sont-ils réellement ? En ligne, le dictionnaire Le Robert tempérait ce phénomène il y a trois ans en prenant appui sur l’ouvrage « Le français n’existe pas » de Jérôme Piron et Arnaud Hoedt (paru donc chez Le Robert), rappelant à bon escient que « moustache vient de l’italien, guitare de l’arabe en passant par l’espagnol et, quand il désigne un moyen de transport, le mot train nous vient de l’anglais », mais aussi que « Stendhal écrit Les Mémoires d’un touriste et introduit pour l’occasion le mot touriste dans la langue française. On lui doit l’expression « happy few », utilisée dans La Chartreuse de Parme en référence au Henry V de Shakespeare. Et Mallarmé est le premier à utiliser le mot fashion. » Très disruptif ! Est-ce un signe, au même titre que le pays France, que notre langue française va mal ? Lorsque certains élus arrivent sur les bancs de l’Assemblée Nationale en jeans-baskets, bien que cela soit looké et moderne, il s’agit d’un même combat. À méditer… Sur ces mots qui ne suffisent pas toujours à pallier les maux, un bel été à vous, lectrices et lecteurs, avec qui sait, à vos côtés, un des livres que nous vous conseillons dans ces pages. Donnons-nous rendez-vous dès le 24 août pour de nouvelles aventures à lire, sans fautes si possible (l’erreur est humaine), politiques, culturelles, associatives, et compagnie. via nos divers articles. Sans Chat GPT et robots consorts, lesquels pour notre part de journaliste “old-school”, enfin vieille France, nous hérissent le poil, autant que les allergiques à l’invasion angliciste.

Émilie Rencien