Derrière le volant, prévenir plutôt que guérir… ?


La signature du document général d’orientations de sécurité routière mardi 26 juin à Blois.

Répéter, râbacher, seriner. Un document général d’orientations de sécurité routière (DGO) vient d’être signé à la préfecture de Blois. Sur fond de grogne.

La limitation de vitesse sur les routes départementales a été abaissée de 10 kmh le 1er juillet. La panacée ? Les esprits s’échauffent, pendant que l’argument sécuritaire est à nouveau avancé pour faire avaler la couleuvre restrictive. Les excès des uns pénalisent sans doute les autres. « Dans l’Auto magazine de 1973, lors de l’annonce de l’entrée en vigueur de la limitation de vitesse, la tribune était déjà enflammée, » relate le préfet de Loir-et-Cher, Jean-Pierre Condemine. « Et on se souviendra de l’accident qui aura coûté en 1960 la vie à Albert Camus en empruntant la N6, pour finir contre un platane… » Le problème ne date par conséquent pas d’hier. Rappelons que jusqu’en 1972, les automobilistes circulaient sans ceinture, le regard bien loin du compteur, avec un petit verre éventuellement dans le nez. La liberté ! Assurément. Un monde révolu. Les temps ont changé, le nombre de véhicules, plus performants, sur les routes se veut exponentiel et les distracteurs, c’est-à-dire téléphone portable, musique, GPS, ont élu logis dans l’habitacle. Sans oublier l’alcool, les stupéfiants et la vitesse. Alors, les acteurs concernés, services de l’Etat et forces de l’ordre, doivent inlassablement faire preuve de pédagogie, car les chiffres d’accidentologie sur notre département ne baissent pas. En 2015, 27 morts, 29 en 2016, 34 en 2017 et déjà, 14 depuis le début de l’année 2018… En première ligne de mire, jeunes et seniors. La survenue d’un accident peut être multi-factorielle et la cause réside souvent dans un comportement humain inapproprié. Le DGO, document partenarial, définit de fait pour cinq ans les enjeux inhérents aux risques de la route, pour éviter à tout un chacun de circuler à tombeau ouvert. « Le Code de la route, à l’inverse du Code civil par exemple, est le seul qu’il est possible de lire sur la route, » a souligné Frédéric Chevallier, procureur de la République de Blois. « Ne pas respecter la vitesse et enfreindre par esprit de contradiction est un comportement digne d’un adolescent. Et autant de souffrance que je constate à la barre avec des familles en deuil et de mauvaises nouvelles à annoncer. » L’électrochoc est de fait provoqué, quitte à prendre des mesures coercitives comme les 80 kmh, pas vraiment comprises et c’est peu de le dire, tant cette nouvelle donne imposée se révèle impopulaire. A 90 kmh, on se fait déjà doubler aisément alors moins 10, que cela peut-il changer, à part devoir prendre son mal en patience ? Oui mais des distances de sécurité et des temps de réaction allongés, selon les autorités compétentes qui se justifient ainsi. Il faudra bien s’adapter de toute façon, grogne ou pas ; les panneaux, sur les routes du Loir-et-Cher tout au moins, prêts à entrer sur la piste asphaltée en ce mois de juillet. Les forces de l’ordre seront d’ailleurs présentes sur les RD 923, 675 et 357 dans les prochains jours. « Dans un premier temps, nous allons distribuer des flyers concernant les 80 kmh, » a précisé le lieutenant-colonel Phocas, à la tête du groupement de gendarmerie. « Et nous sanctionnerons uniquement pour commencer les grandes infractions. » Dans d’autres départements, le Loiret notamment, le son de cloche répressif semble discordant, avec des contraventions qui devraient plutôt tomber sans tolérance comme des petits pains pour celles et ceux qui décideraient de maintenir leur pied courroucé sur leur champignon rebelle. Et quid des constructeurs automobiles ? Ils ont assurément des efforts eux aussi à réaliser. La tentation reste immense aux mains d’un bolide aux chevaux puissants et il peut a contrario s’avérer dangereux de trop rouler au pas, même si certaines voies de circulation, chaotiques du fait de trous en formation, obligent ce ralentissement. On ne parle même pas du bridage des autos, vouées à consommer davantage. Et caetera, et caetera. Rien n’est aussi manichéen qu’il n’y paraît de prime abord, et surtout la logique des uns ne concorde pas forcément avec la cohérence des autres. C’est finalement un peu comme donner le bâton pour se faire battre, à chacun de prendre ses responsabilités n’est-ce pas…

Emilie Rencien