Les abeilles dans la guerre, par Marieke Aucante


Les Abeilles grises, de Andrei Kourkov. Éditions Liana Levi

Les Abeilles grises, paru en russe en 2018 raconte le conflit dans l’Est de l’Ukraine du point de vue d’un retraité des mines du Donbass. Ce personnage reconverti en apiculteur offre un voyage à ses abeilles jusqu’en Crimée pour leur éviter le fracas quotidien des bombes.

En zone « grise » Il ne reste que deux hommes dans le village abandonné par ses habitants, coincé sur la ligne de front entre armée Ukrainienne et séparatistes pro-russes. Pachka et Sergueitch, ennemis d’enfance sont obligés de se supporter pour ne pas sombrer. Leurs conditions de vie sont rudimentaires : charbon pour le chauffage, conserves pour la nourriture, bougies récupérées dans une église détruite pour s’éclairer. 
Sergueitch ne souffre pas trop de la situation de guerre car il ne pense qu’au bien-être de ses abeilles et il fait des rêves visionnaires. Il croit au pouvoir de ses abeilles depuis le jour où des citadins importants sont venus de loin pour se guérir de leurs maux en dormant allongés sur le toit de ses ruches : «  Les vibrations produites par les abeilles agissent de manière bienfaisante sur les nerfs, elles rajeunissent. »
Avec ses 6 ruches et sa vieille voiture, une Tchetviorka verte, il part à l’aventure, rencontre une épicière qui lui vend son miel, puis il poursuit son voyage vers la Crimée. Il y trouve un bel emplacement dans la montagne, mais il ne peut rester longtemps car il se passe des choses étranges côté russe.
L’auteur Andrei Kourkov adapte son style d’écriture à la vie de son personnage. Sergueitch est un humaniste qui traverse la vie poétiquement grâce à ses abeilles. Dans un monde absurde les abeilles donnent du sens à la vie. « L’air s’emplirait d’un doux bourdonnement familier et pacifique, que la paix de l’homme qui aime les abeilles rend plus discret encore, rend intime et domestique. Et alors, peu importerait qu’on entende ici et là des coups de feu l’important, ce serait le printemps, la nature qui s’emplit de vie, de ses bruits, de ses odeurs, de ses ailes grandes et petites. »

M.A.