Sa préférée, de Sarah Jollien-Fardel, par Marieke Aucante

On sait bien que l’enfance marque de façon indélébile la vie d’adulte. Ce livre remarquablement écrit nous permet d’en mesurer l’impact.

Jeanne la narratrice grandit dans un village haut perché du valais. Elle est la seule à tenir tête à son père qui boit et tape sur sa sœur et sa mère. Un jour, elle aussi reçoit les coups et le silence du médecin appelé à son chevet la révolte. Son dégoût pour tant de lâcheté et la haine de son père vont la conduire à partir ailleurs pour ses études. Le suicide de sa sœur parce que abusée par le père amplifie sa sauvagerie même loin de sa famille. Quand elle s’essaie à une vie amoureuse, son passé s’y invite encore. Ce livre est aussi un roman puissant sur l’appartenance à une terre natale, où Jeanne n’aura de cesse de revenir, aimantée par son amour pour sa mère et la culpabilité de n’avoir su la protéger de son destin.
«  Je n’ai pas fait semblant, j’ai vécu un jour derrière l’autre sans qu’aucun ait pu effacer la peur et la rage de mon enfance. Ce n’est pas grand chose pourtant une enfance. Mais c’est tout ce qui subsiste pour moi, je ne sais pas me réfugier ailleurs.
Je sais que rien ne m’émeut jusqu’au bouleversement, jusqu’à déliter ma colère. Que les fondations de mon enfance ne sont pas assez solides pour que je tienne debout. Je pense à la terre des jardins qu’on retourne au printemps, à ce que disaient les vieux du village. :-Y a pas moyen, t’as beau rajouter du fumier, ça prend pas la terre n’est pas bonne… mauvaise terre, mauvaise graine.
Un beau roman sur la tentative de résilience

Marieke Aucante


Sa préférée de Sarah Jollien-Fardel

Sabine. Wespieser Editeur

Parution Août 2022. 20 euros